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LA SOCIÉTÉ DES NATIONS ET LES PUISSANCES
p u n o u r r i r l ' Au t r i che dans le Proche-Orient, o n ne saurait j ama i s r e f u –
ser à la guerre russo-turque le caractère d'une véritable
guerre
d'huma–
nité.
Le Congrès de Berlin a certainement satisfait les visées territoriales
o u politiques de quelques puissances : i l a permis à l ' Au t r i c h e d'occuper
les provinces serbes de Bosnie et d'Herzégovine ; i l a donné à la Russie
les territoires d'Ardahan, de Kars et de Batoum. Mais i l n'en reste pas
mo i n s vrai que la guerre n'aurait pas été possible s i les Turcs avaient
réalisé les réformes annoncées par le traité de Paris. Le traité de B e r l i n
resl9 donc, avant tout, une sanction pou r la violation de celui de
Paris. Et cette sanction constitue une des p l us éclatantes manifesta–
tions de l'intervention d'humanité en faveur des races opprimées de
l'Empire o t t oma n .
I V
L'INTERVENTION D'HOMANITÉ PENDANT L'ÈRE HAMIDIENNK.
Le dernier Sultan absolu de l a Tu r qu i e , Abdul-Hamid i l , donna son
n om à une des plus sombres périodes de l'histoire ottomane. Son règne,
imprégné par sa forte personnalité despotique, fut une réaction vio–
lente contre les essais de réformes tentés par ses prédécesseurs. Le
Parlement, à peine convoqué, f u t dissous ; la Porte était pratiquement
anéantie par l ' i mm i x t i o n continuelle, dans toutes les affaires, d u Palais
tout puissant ; l'espionnage, la terreur, la spoliation des sujets, le gas–
pillage des ressources de l'État, étaient les seuls principes du gouver–
nement personnel de celui qu i a passé dans l'histoire sous le nom de
«
Sultan rouge ».
Ce régime abject pesait sur tous les sujets de l ' Emp i r e , ma i s d ' un
doub l e poids sur les Chrétiens. Car, par l'excitation d u fanatisme mu s u l –
man à l'intérieur et par une habile politique panislamiste à l'extérieur,
A b d u l Hamid accentuait dans une courbe ascendante le caractère théo-
cralique de l'État turc opp r iman t tous les peuples chrétiens plies sous
sa l o i , On peut le dire sans crainte d'être suspect d'exagération, la
politique d u Sultan visait tout simplement à l a réduction, v o i r e , dans les
circonstances favorables, à l ' e x t e rmi na t i on des éléments chrétiens de
son Emp i r e . Des terribles amputations reçues par l a Tu r qu i e aux
débuts de son règne, Ab du l - Ham i d n'avait retiré aucun enseignement
salutaire. I l n'en gardait qu ' une grande méfiance vis-à-vis de toute
i n t e r v e n t i on européenne q u ' i l se proposait de prévenir n o n pas par des
réformes spontanées, mais par la suppression graduelle de ceux q u i
donnaient lieu à cette 'intervention.
Fonds A.R.A.M