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LA SOCIÉTÉ DES NATIONS ET LES PUISSANCES
Cependant, la Porte ne céda pas, et la Conférence de Constantinople
se sépara sans résultat. Dès lors, la Russie, dont l ' o p i n i on pub l i que
demandait hautement la délivrance des Slaves du j o u g turc, dut recourir
à la force. La Conférence de Londres de 1877 fit un dernier effort pour
ramener la Porte à la raison. Le protocole de Londres d u 31 mars 1877
ne rappelle en rien le ton courtois de l'article 9 du traité de Paris. « Les
Puissances, y est-il dit, se proposent de veiller avec soin, par l ' i n t e r –
médiaire de leurs représentants à Constantinople et de leurs agents
locaux, à la façon dont les promesses d u gouvernement otloman seront
exécutées. Si l eu r espoir était encore une fois déçu et si la condition des
sujets chrétiens d u Sultan n'était pas améliorée de manière à prévenir
le retour des complications q u i t r oub l en t périodiquement le repos de
l'Orient, les Puissances croient devoir déclarer qu ' un t e l état de choses
serait incompatible avec leurs intérêts et ceux de l'Europe. En pareil
cas, elles aviseraient en c ommun aux moyens qu'elles jugeraient les plus
propres à assurer le bien-êlre des populations chrétiennes et la paix
générale » ( I ) .
Mais les Turcs protestèrent contre ce qu'ils appelèrent « la tutelle
humi l i an t e » de l'Europe (2), et l'Empereur de Russie donna ordre à l'ar–
mée russe de franchir la frontière « pou r obtenir, d i t - i l , par la force
ce que les efforts unan ime s des Puissances n'avaient pas réussi à obte–
n i r par la persuasion ». La Russie fut victorieuse, et le traité préliminaire
de San Stefano d u 19 février 1878, qu'elle imposa à l'Empire ottoman,
libéra la majeure partie des Chrétiens de la Tu r qu i e d'Europe.
Le traité de Berlin d u 13 j u i l l e t 1878, encore q u ' i l ait, pour des raisons
d'opportunité po l i t i que , replacé sous la domination ottomane une partie
des populations libérées par l e traité de San-Slefano, marque cependant
une énorme étape dans l'histoire de l'affranchissement des nations n o n -
turques de l'Empire o t t oma n . I l proclame l'indépendance de la Serbie,
de la Roumanie, du Monténégro ; i l érige la Bulgarie en principauté vas–
sale et la Roumanie orientale en province autonome, en subordonnant
à l'assentiment des Puissances la confirmation par l a Porte d u Prince de
Bulgarie l i b r eme n t élu pa r l a popu l a t i on ainsi que la nomi na t i on d u
prononcer d'avance sur la valeur de la Constitution récemment promulguée, dont
nombre de nouvelles lois doivent encore compléter les dispositions et déterminer le
véritable caractère, je crois devoir prémunir ta Sublime Porte contre les atteintes qui
pourraient être portées aux stipulations du Halli-Houmavouti de 18S6 et aux prescrip–
tions du Firman du 12 décembre 1875, et qui constitueraient une violation des engage–
ments contractés a l'égard de l'Europe, s (Séance du 8/20 janvier 1871, Noradounghian,
Recueil,
t. I I I , p. 492).
(1)
Engelhardt,
op.
cit., t. I I , p. 178.
(1)
Circulaire de Safvet Pacha du 9 avril 1817, Engelhardt, op.
cit.,
t. II, p. 119.
Fonds A.R.A.M