DEVANT L E PROBLÈME ARMÉNIEN
189
Commission des minorités se r appo r t a i t aussi au passé. Nous rendons
hommage à l ' i n t e n t i on q u i gu i da i t certainement le délégué de l ' I t a l i e
lorsqu'il tâchait de démontrer aux Tu r c s que, dès le début, les p r opo .
sitions des Alliés de créer u n Foyer national ne comportaient pas l ' a u –
tonomie : i l espérait, sans doute, pouvoir ainsi décider p l us facilement
les Turcs à accorder les quelques droits culturels que les Puissances
revendiquaient encore pour les Arméniens. Mais, au po i n t de vue h i s t o r i –
que, nous.ne saurions souscrire à celle thèse. A Londres,en mars 1921,les
Alliés, dans l'abandon progressif de leurs d r o i t s , q u i est si caractéristique
de leurs négociations d'après-guerre avec les Tu r c s , n'étaient pas encore
parvenus à l'élat d'âme de Lausanne. Après le sacrifice de l'indépen–
dance arménienne, i l s étaient seulement arrivés à l'étape de l'autonomie,
à laquelle — i l ne faut pas l'oublier — les .Turcs avaient déjà en partie
consenti avant la Grande Guerre, sous la forme de réformes stipulées
dans l ' 8 c c o r d russo-turc d u 8 février 1914 (1 ), réformes comportant, entre
autres choses, l ' i n s t i t u t i o n d'inspecteurs généraux étrangers pou r les
provinces arméniennes. L'idée d'une autonomie, d ' un self-government
arménien était s i bien ancrée encore à cette époque dans l'esprit des
puissances que, comme nous le verrons plus l o i n , la deuxième Assem–
blée de la Société des Nations vota, le 21 septembre 1921,
à l'unanimité,
une résolution en faveur d'un Foyer national entièrement
indépendant
la domination ottomane. Et la seule réserve, celle de la France, au sujet
de ce vœu, ne s'adressait qu'à la qualification du Foyer comme indé–
pendant. On peut"donc conclure de ce vœu unan ime que la conception
du Foyer national comme simple « point de concentration pou r les Armé –
niens éparpillés dans le monde » — p o u r employer la terminologie de
Lausanne — était, en 1921, fort éloignée de la conscience des représen–
tants des peuples réunis, pour la seconde fois, à Genève, pour délibérer
sur les affaires d u mond e . .
La Conférence de Londres finit, d'ailleurs, par un échec. En remettant
le projet des Alliés aux Grecs et aux Turcs, le Président de la Confé–
rence, M. L l o y d George, leur déclara que les propositions actuelles
formaient un tout et qu'elles se substituaient à toute proposition faite
antérieurement. Aucune des Délégations n'ayant pu accepter ces p r opo –
sitions sans en référer à son gouvernement, la partie orientale de l a
Conférence de Dondres se t e rmi na sur cette offre des Alliés, q u i n'eut
point de suites.
(
I) V. ci-dessus, p. 43.
Fonds A.R.A.M