DEVANT L E PROBLÈME ARMÉNIEN
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à l'entérinement de cette nouvelle charte ottomane une forme assez
ambiguë. I l est cependant évident que, malgré les termes employés, la
promesse de non - i n t e r v en t i on dans l ' admi n i s t r a t i on intérieure de l ' Em –
pire est la contre-partie de l a c ommun i c a t i on d u F i rma n soi-disant
t spontané » d u Sultan : autrement, les Puissances n'en auraient pas
constaté « la haute valeur ». En tout cas, l'histoire a démontré que telle a
été l a pensée des Puissances ; car l'article 9 d u traité de Paris est devenu
le p o i n t de départ de l'intervention collective régulière des Puissances
dans les affaires intérieures de l a Tu r q u i e .
Cette i n t e r v en t i on se fit pressante peu d'années après l a conclusion d u
traité. Le 5 octobre 1859, les représentants des Puissances garantes
adressaient au Grand Vizir un Mémorandum où i l s exprimaient « le
regret de voir que la Turquie ne s'aidait pas par elle-même, qu'elle ne
procédait pas à une application graduelle et soutenue des réformes,
qu'une suffisante impu l s i on ne se manifestait pas pou r atteindre le b u t
marqué par le F i rman de 1856 » (1). En 1860, l a Russie demanda une
enquête internationale sur la situation des rayas de Bulgarie, de Bosnie
et d'Herzégovine ; cette demande n'eut d'ailleurs comme suite qu'une
enquête grand-vizirielle insuffisante et sans résultats. De son côté,
l'ambassadeur d'Angleterre, sir Bu l we r , consulta les consuls anglais
sur l'état intérieur d u pays. Ceux-ci l u i signalèrent entre autres choses
que la mauvaise situation des Chrétiens était surtout imputable à l ' a dmi –
nistration : « Nulle part, d'après eux, le fanatisme mu s u lman ne procède
par explosions spontanées ; i l n'éclate' en violences qu'après avoir été
encouragé par les dispositions des agents de l'autorité pub l i que ».
Là-dessus s i r Bu l we r élabora u n projet de réformes q u i a l l a i t j u s –
qu'à revendiquer, pour les
ambassades,
le d r o i t de déférer au j u g e –
men t de la Porte des fonctionnaires
turcs
dont elles auraient à se
plaindre (2).
I l faut noter que les projets de réforme des ambassades, quoique
principalement inspirés par le désir d'améliorer le s o r t des
Chrétiens,
préconisaient toujours une réforme générale de l ' a dmi n i s t r a t i on d u
pays telle que l'avait annoncée le Halli-Houmayoun de 1856. Cependant
la Porte, malgré cetle ingérence continuelle des ambassades q u i l u i
démontrait le véritable sens de l'article 9 d u traité de Paris, ne trouvait
pas le courage nécessaire pour une véritable régénération de l ' Emp i r e .
Dès lors, les Puissances se voyaient réduites a u système des interven–
tions limitées aux provinces ottomanes où, à t ou r de rôle, l ' i ncu r i e
(
t) Engelhardt,
La Turquie et le Tanzimat,
t. I , p. 161.
(2)
Engelhardt,
op. cit.,
t. I , p. 170-112.
Fonds A.R.A.M