DEVANT L E PROBLÈME ARMÉNIEN
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Je sais que M . le Président du Conseil, du côté de la Cilicie, a obtenu des
résultats au point de
Tue
économique, et je le sais trop avisé pour ne pas com–
prendre que, tout de même, i l y a une partie de la Cilicie qu'il n'est pas négli–
geable de garder, que c'est une question d'honneur et une question d'humanité.
Et je me tourne vers vous
(
l'extrême gauche)
;
vous dites: « Partez » I Si vous
étiez au gouvernement, précisément, pour le respect de vos principes, de vos
idées, je vous mettrais au défi de partir. Vous entendez: au défi,
[
Vifs
applaudis–
sements à gauche, à droite el au centre.)
Partir, après avoir amené là ce qui restait d'Arméniens non massacrés, partir
après ce qui s'est passé pour les Syriens, et les essais de représailles qui s'accu*
mulent dans l'esprit des Turcs, Savez-vous çe que cela veut dire ? Cela signifie
que des centaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants seront massacrés,
parce que le drapeau français leur aura manqué.
(
Vifs
applaudissements.)
Je dis que la France n'a pas le droit de se comporter de la sorte. Elle n'en a
pas le droit.
(
Nouveaux
applaudissements)
» (1).
B. —
Situation de la
Grande-Bretagne.
La politique de la Grande-Bretagne, pendant la période préparatoire
qui aboutit à la signature d u traité de Sèvres, visait manifestement à
l ' e xpu l s i on des Turcs de l'Europe et au groupement, sous l'égide b r i –
tannique, des pays arabes. Mais cette politique subissait cependant
l'influence intermittente d'une grave préoccupation : celle de ne pas
provoquer, dans le monde de l'Islam, et surtout dans celui de l'Inde,
un mouvement dangereux pour l'unité de l ' Emp i r e b r i t ann i qu e . Les
oscillations d u gouvernement anglais entre ces visées et cette c r a i n t
6
étaient encore augmentées par le caractère i mpu l s i f et versatile de son
premier ministre.
Nous avons vu que le 5 j anv i e r 1918 (2), dans u n discours prononcé
devant les Trades Unions, M. L l o y d George avait déclaré que l'Angle–
terre ne combattait pas pour déposséder la Tu r qu i e de Constantinople,
ni des contrées de l'Asie Mineure e l de la Thrace dont l a popu l a t i on
prédominante était de .race turque (3). Majs cette déclaration, faite
encore en pleine gue r r e , n'aurait pu obliger l'Angleterre envers la
Turquie qu ' au cas où cette dernière aurait mi s bas les armes en ce
(1)
l'Asie française,
juillet-août 1920, n« 184, p. 2 i l .
(2)
V. ci-dessus, p. 141.
(3
| « Nor are we
flghting to deprive Turkey of its capital or of the rich and renow-
ned lands of Asia Minor and Thrace whieh are prédominant!? Turkish in race... We
do not challenge the maintenance of the Tuikifh Empire in the homelands of the Tur
r
kish race with its capital in Constantinople, the passage between the Méditerranéen and
the Black Sea being internationalized and neutralized... Aiabia, Armenia, Mcsopolamia,
5
yria and Palestine are in our judgment entitled to récognition of their separate natio–
nal conditions ».
Fonds A.R.A.M