450
LA SOCIÉTÉ DES NATIONS ET LES PUISSANCES
partie des « Confins militaires » avec Marache et Diarbékir. Et , de
-
l'autre, l a région de Mossoul détachée de l a Syrie était attribuée au
mandat anglais. Enfin, sacrifice surtout douloureux pour la France, la
Palestine passait également sous le mandat britannique (1).
Cependant une partie de la Cilicie restait au mandat français. Et cette
partie au moins, d'après l'avis d u négociateur français des accords de
1916,
ne devait pas être abandonnée par la France. En répondant aux
clameurs de l'extrême-gauehe demandant l'évacuation, M. A r i s t i d e
Briand prononça, à la séance du 23 j u i n 1920 de la Chambre des dépur
tés, les mémorables paroles que voici :
«
Moi j e m'honore, dans le moment où je les a i conclus, d'avoir fait ces accords.
Ce que j e souhaite, c'est que l'on en t i r e p a r t i .
sit cependant dans la Gilicie côtière. La colonne Gracy enleva Yénidjé,. dégagea Tarsons
et délivra Mersine. Le siège d'Adana fut levé par les Kémalistes le 19 août (Brémond,
op.
cit.,
p . 64-68).
Comp. aussi sur les tristes événements en Gilicie et surtout les massacres de Mara–
che et le guet-apens d'Ourfa, Paillarès,
Le Kémalisme devant les Alliés,
p. 108-116, et
les nombreux articles dans le
Times
des 17, 18,19 février et des 3, 8, 15, 17 mars 1920.
(1)
Sur la modification des accords de 1916 comportant, pour la France, l'abandon
d'nne partie de la Cilicie et de la Palestine et de Mossoul, V . les débats à la Chambre
des députés française des 24, 25 et 26 juin 1920, dans l'Asie
française,
n° 184, débats
empreints d
'
nne
grande amertume. Le rapporteur du budget, M . Noblemaire, dit, le
'
j
juin, en expliquant l'attitude du gouvernement anglais au sujet des accords de 1916 :
«
Quant au gouvernement anglais lui-même, notre co-contractant, pour l u i aussi un fait
nouveau s'est produit. I l
n
'
a cessé de soutenir que les accords de 1916 impliquaient une
participation effective de notre pays que la France n'a pas pu donner, et vous savex pour
quelle glorieuses raisons, aux opérations contre la Turquie en Palestine et en Syrie. Le
premier ministre anglais ajoutait qu'il ne revendiquait pas la Syrie et qu'il était prêt & y
soutenir l'octroi du mandat français. Mais ce mandat était limité, selon lui, par deux con–
cessions, faites ultérieurement par le gouvernement français, dont on vons a longuement
entretenus : la concession de Mossoul sur laquelle vraiment i l n'y a plus rien à dire, au
moins aujourd'hui, et la concession de Palestine, sur laquelle i l n'y a peut-être plus
beaucoup à dire, mais sur laquelle vous permettrez pourtant au Français et au Chrétien
que je suis de dire qu'il y a peut-être beaucoup à pleurer ».
D'autre part, voici comment le député Lenail, le 25 juin 1920. s'est prononcé sur la
répartition des territoires de l'ancien Empire ottoman : « Mais, laissant de côté l'énormité
de cette part anglaise, — car vous savez que sur les 32 millions d'habitants que compte
la Turquie en y comprenant l'Arabie, l'Angleterre en prend près de 15 millions, en lais–
sant 11 millions à la Turquie et 3 millions à la France, — vous savez qu'au point de vue
des territoires, sur les 4 millions et quelques centaines de milliers de kilomètres que
comporte la Turquie, toujours en y comprenant l'Arabie, l'Angleterre prend 3 millions
de kilomètres carrés et nous 220.003. En laissant encore ce qu'a vraiment d'extraordi–
naire, d'inespéré, la réalisation de ce plan anglais, qui fait la soudure entre ses posses–
sions d'Afrique et ses possessions d'Asie, et s'en va depuis les côtes de Lybie a travers la
Mésopotamie, à travers la Perse, à travers l'Afghinistan, à travers l'Hindoustan, à tra–
vers la Birmanie jusqu'à l'île de Ceylan et aux Philippines, rejoignant d'une façon véri–
tablement splendide, sous le sceptre britannique, la mer de Chine au coeur de la mer
Méditerranée, je reviens tout modestement à ce qui est la part française, à la Syrie ».
Fonds A.R.A.M