DEVANT L E PROBLÈME ARMÉNIEN
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nisation des rayas était bien loin de répondre, dans l'esprit de l a Porte,
à une large conception de la mission de l'Étal. Elle n'était due qu'à l a
simple considération q u ' i l était parfois très opportun d'exercer une pres–
sion sur les rayas par l'intermédiaire de leurs organes officiels. Auss
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les Turcs s'en prenaient-ils souvent à ces derniers : i l n'y a qu ' un siècle»
lors de l'insurrection grecque en Morée (1821), que le Patriarche œcumé–
nique fut pendu à la porte même de l'Eglise patriarcale où i l venait de
célébrer la messe de Pâques. Et, à aucun moment, les doléances des
Patriarcats ou les protestations des Assemblées nationales n'ont p u
exercer la moindre influence sur la politique intérieure t u r que . Pendant
toute la durée de la domination ottomane, les rayas restaient ployés
sous le j o u g d'une administration fanatique, incapable et ignorante, les
écrasant sous les impôts, taxes et exactions et ne sachant se ma i n t e n i r
que par la terreur perpétuelle et les massacres périodiques. C'est ainsi
que, derrière la façade libérale des privilèges des « Nations », le g r and
Empire fondé par les conquérants ottomans a gardé intact, pendant
toute sa longue existence, son double caractère de théocratie mu s u l –
mane et de despotisme turc.
I I
PÉRIODE DE LA PRÉPONDÉRANCE DE L'INFLUENCE RUSSE.
Fondé sur l'exploitation de l'énorme majorité non-musulmane par la
minorité des conquérants turcs, l'Empire ottoman était fatalement voué
à une décomposition graduelle, en raison directe de l'affaiblissement
de son pouvoir m i l i t a i r e et de l'augmentation de la pression des Étals
voisins. Parmi ces États, c'était l a Russie q u i , depuis Pierre le Grand,
portait les plus formidables coups à l a Turquie et q u i , après chacun,
non seulement évinçait les Turcs des rives de la mer Noire, mais encore
étendait son influence sur les affaires intérieures de l'Empire. Le célèbre
traité de Ku t chuk - Ka i na r d j i de 1174 obligea la Sublime Porte à « une p r o –
tection constante de la religion chrétienne et des églises de cette r e l i –
gion ». Par le même traité et toute une série d'autres (1) conclus après
(1)
L'article 16 du traité de Kutchuk-Kainardji de 1114 stipule toute une série de
privilèges pour les Principautés de Moldavie et de Valachie et donne aux ministres de
Russie le droit « de parler eD leur faveur ». Les traités de Yassi de 1192 (art. 4) et de
Bucarest de 1812 (art. 5) ont confirmé tous ces privilèges. Et, depuis, la protection de
l a Russie n'a cessé de se Iruduire par des stipulation* relatives à l'autonomie des
Piincipautés et à la nomination de leurs Hospodars (Princes;. Ainsi, d'après l'acte
sépcré (Sened) annexé à la convention d'Akkerman du 25 seplembre-1 octobre 1826,
les Hospodars sont élus par les Assemblées (Divans) des Eovaids et confirmés par la
Porte ; mais celle-ci ne peut refuser son agrément que pour des raisons graves qui
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