CHAP I TRE VIII
LA P O L I T I Q U E ARMÉNIENNE D E S PRINCIPALES PUISSANCES ALLIÉES EN FONCTION D E
L E U R P O L I T I Q U E GÉNÉRALE DANS L E PROCHE ORIENT D E P U I S LA GRANDE G U E R R E
JUSQU'AU R E V I R E M E N T A LA CONFÉRENCE D E LONDRES D E
1921.
Comme nous l'avons constaté (1), le traité de Sèvres a été l'abou–
tissant logique de l'intervention d'humanité en Tu r qu i e . 11 libérait l a
p l upa r t des populations non-turques de l'emprise ottomane, soit en
plaçant leur territoire sous le mandat des Principales Puissances alliées,
soit en l'annexant à l'État congénère ; i l limitait, en outre, l a souverai–
neté de l'État ottoman ainsi réduit, aussi bien au nom du droit h uma i n ,
en l u i imposant la protection des minorités, qu'au nom du droit interna–
tional, en le plaçant sous un véritable contrôle militaire, financier et
économique. En particulier, l'Arménie russe recevait, avec la r e c on –
naissance de son indépendance, l'espoir de se voir adjuger par le
Président Wi l s on des parties ou même la totalité de quatre vilayets de
l'Arménie t u r qu e .
Malheureusement le traité de Sèvres fut non seulement l'aboutissant,
mais aussi l e point cu lmi nan t de l'intervention d'humanité. En effet,
immédiatement après sa signature, la courbe de cette intervention
commençait à descendre et, seulement sept mois après, en mars 1921,
les Principales Puissances alliées, réunies à Londres en Conférence
avec les Turcs e t l e s Grecs, se déjugeaient, en grande partie, de leur
œuvre et, surtout, en reniaient l'esprit. Au x Tu r c s , auxquels elles
avaient dicté leurs volontés à Sèvres, elles proposaient maintenant des
conditions de paix considérablement adoucies. Et au nombre de ces
conditions ne figurait plus l'attribution à l'État arménien indépendant
de territoires ottomans, malgré la sentence que le Président Wi l s on
avait rendue précisément dans l'intervalle entre les réunions de Sèvres
et de Londres et qu i adjugeait à l'Arménie une grande partie des quatre
vilayets. Les Alliés ne demandaient désormais aux Turcs que la cons–
titution d'un
Foyer arménien,
sans stipuler son indépendance et sans
préciser ses frontières.
(
t) V . p. 27 et suiv.
Fonds A.R.A.M