DEVANT L E PROBLÈME ARMÉNIEN
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La p l up a r t des orateurs de l'Assemblée exprimèrent, a u sujet des
États baltes, des vues analogues.
Le représentant de l a Suède, M. B r an t i ng , expliqua nettement que la
proposition de la Commission tendant à l'ajournement de leur admission
n'était due qu'à la prise en considération de l'article 10 : « A cette heure,
où l a situation générale est si confuse, alors que n i l'Esthonie, n i la
Lettonie, n i la L i t huan i e n'ont encore été reconnues par aucune dés
grandes Puissances, ce serait, précisément pour les États qu i veulent
tenir leurs engagements, u n risque que nous ne pouvons prendre à la
légère que d'admettre dans la Société des Nations, en ce mome n t , ces
États qu i par leur s i t ua t i on géographique sont malheureusement si
exposés aux attaques d'une puissance dont personne ne connaît les
intentions, dont personne ne sait s i , quelque j o u r , elle ne se t r a n s –
formera pas en une puissance de conquête menaçant l a liberté de
l'Europe » (1).
i M. V i v i an i (France) abonda dans le même sens. « I l y a dans le Pacte,
d i t - i l avant le vote sur l'admission des (rois États baftes, u n certain
article dont i l est beaucoup parlé q u i s'appelle- l'article 10. Cet article
nous met en devoir, lorsque nous avons appris qu ' un associé est en d an –
ger dans les termes de l'article 10, de l u i porter secours. Et c omme nous
n'aimons pas men t i r aux peuples, comme l a pire po l i t i que c'est d'entre–
tenir des déceptions dans les consciences populaires, de faire croire aux
gens qu'on les secourra quand on ne les secourra pas, ceux qu i pensent
qu'ils ne peuvent pas se porter aux confins de l'Europe pour les sou–
tenir ont voté, comme la France a voté et comme j e voterai, le projet
de la Commission, c'est-à-dire l'admission dans les organisations
techniques » (2).
Le point de vue opposé fut défendu avec éclat, mais sans succès, par
les représentants d u Portugal, delà Colombie et de l ' I t a l i e .
Le délégué portugais M. Chagas, en parlant de l'Esthonie, déclara ne
pas s'apercevoir que l ' a r gumen t de l'incertitude q u i planerait sur l'ave–
n i r de cet État, ainsi que sur celui de ses voisins, fût fondé sur des
raisons bien justifiées. « Ces États, d i t - i l , nous demandent de l e u r
garantir la vie : nous avons l'air de les condamner à mo r t , sous le pré–
texte que leur existence p o u r r a i t être en danger... Si telle était l a r a i –
son de notre refus, elle p ou r r a i t être également appliquée à n ' impo r t e
quel autre État constitué et dont l'existence serait u n j o u r éventuelle–
ment menacée ». M. Restrepo (Colombie) affirma que « c'était un devoir
(1)
Actes de la première Assemblée,
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séance plénière, p. 622.
(2)
Ibid.,
p. 626.
Fonds A.R.A.M