82
LA MORT DE STAMBOUL
recommandations morales et cinq ou six obligations
rituelles en composent tout l'attirail religieux; ses
Croyants alertes, partis de la Mecque, — la Jéru–
salem arabe, — ont couru j u s qu ' à l'Atlantique et
jusqu'au Gange, sans l'une de ces haltes décisives,
Alexandrie, Antioche, Byzance, Rome, où, parti de
Jérusalem, le christianisme s'est muni d'une dialec–
tique, d'une éthique, d'une politique, d'une philoso–
phie de l'univers et de l'homme... Que serait le
christianisme s'il en fût resté aux simples paroles
de Jésus?... L'Islam, môme parmi les paroles de
Mahomet, n'a conservé que les plus simples.
Cette simplicité du dogme assura le recrutement
mondial des Fidèles à travers toutes les humanités
et surtout parmi les humanités les plus frustes : sans
longue initiation, sans même la moindre préparation
catéchiste, une formule, « la » formule apprise par
cœur suffit à faire un Croyant,
Allah esl Dieu et
Mahomet est son prophète.
Cette simplicité du dogme empêcha aussi l'éléva–
tion d'un pouvoir clérical : pas n'est besoin d'études
prolongées ni d'une vie séparée du siècle pour tout
savoir et tout comprendre de cette religion, pour en
posséder du moins l'essentiel. Autour du dogme
unique, les arabesques du Coran peuvent offrir à
l'interprétation des spécialistes les mille difficultés
de leurs rébus, métaphores, dictons et citations de
poètes oubliés. Mais la foi n'a rien à voir en ces jeux
de la science coranique; ce sont amusettes de dilet–
tante que le Fidèle, tout en les admirant, peut négli–
ger : un lecteur, un récitateur de Coran, un
hodja
suffit, non pour formuler, mais pour rappeler seule–
ment au peuple toute la loi religieuse,
Chéri,
qui,
Fonds A.R.A.M