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LA MOIiT DE STAMBOUL
tion indéfinie de ce qu'elle appelait le
statu quo,
c'est-à-dire l'autonomie nominale, avec l'indépen–
dance réelle et la marche interminable vers l'union.
De 1908 à 1913, les diplomates de Londres n'oseront
jamais renoncer à cette politique : ils croiront que les
besoins de l'Angleterre dans la Méditerranée et dans
le monde leur en font une nécessité.
—- «
Voyez, disait l'un d'eux, quelle fut la consé–
quence du règlement cubain! Aussi longtemps que
Cuba espagnole fut interposée entre les deux Amé–
riques, ce fut comme un paravent derrière lequel
les Yankees n'arrivaient pas, ne songeaient môme
pas à regarder ce qui se passait chez les répu–
bliques latines du Centre et du Sud : la Havane
fixait toute leur attention... Cuba délivrée, c'est à
Panama et au Venezuela qu'ils courent, c'est d'am–
bitions panaméricanistes qu'ils vivent... La Crète est
un paravent à double et triple effet entre l'hellénisme
d'Athènes et celui de Chypre, entre la Jeune Turquie
de Constantinople et la Jeune Egypte du Caire. Tout
changement en Crète pourrait nous être également
désagréable. La Crète unie au royaume de Grèce,
c'est la poussée de l'hellénisme se ruant vers Chypre
où notre situation est déjà^difficile, où nous sentons,
en toute rencontre, la désaffection, la haine môme
que les indigènes sont tout prêts à nous témoigner.
La Crète rendue aux Turcs, c'est la vanité panisla-
mique prenant texte de ce triomphe pour exiger la
réforme constitutionnelle en Egypte, où notre situa–
tion devient de jour en jour plus critique; sur notre
refus, c'est la Guerre Sainte, peut-être, prêchée à nos
musulmans de l'Inde, qui sont à l'heure présente le
seul appui de notre domination là-bas. N i grecque,
Fonds A.R.A.M