L A C R È T E E T L E K H A L I F A T
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présentes la force et la loi turques. De la mer Noire
à l'Adriatique, de Gonstantinople à Avlona, à travers
toute l'épaisseur de la Turquie d'Europe, i l fallait
que la ligne de Saloniquc prolongée permît la
mobilisation rapide aussi bien contre les armées
balkaniques du Nord et du Sud que contre les agi–
tations albanaises. Du Bosphore au golfe Persiquc,
de Constantinople à Bagdad tout au moins, à travers
toute l'épaisseur de la Turquie d'Asie, i l fallait
pareillement que les troupes ottomanes pussent à
toute heure se concentrer tant contre les avalanches
russes du Caucase que contre les cyclones bédouins
du Nedjcd.
Ces deux tâches primordiales exigeaient des cen–
taines de millions, des milliards peut-être, dont la
Jeune Turquie n'avait pas le premier écu, et des
années, quinze ou vingt ans peut être, de patiente
habileté. I l fallait des dépenses non moins grandes,
non moins longues, non moins urgentes pour créer
l'outillage économique, qui, seul, par des revenus
augmen t é s , permettrait d'acquérir et de renforcer
cette armure. I l fallait des millions et des milliards
pour la double et triple réforme de l'administration,
de la justice, de l'instruction publique à tous leurs
degrés... Dans quarante ou cinquante ans, les amis
de la Jeune Turquie l u i souhaitaient d'acquérir une
flotte : en 1909, ses seuls flatteurs pouvaient l'inciter à
une politique navale, dont les prolits iraient aux ven–
deurs de cuirasses, mais dont la coûteuse folie empê–
cherait la réussite des entreprises indispensables
1
.
1.
Cf. mes articles dans la
Revue de Paris
du 15 juillet 1900 et
du 15 juillet 1910.
Fonds A.R.A.M