L A C R È T E E T L E K H A L I F A T
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qucs différences qui, de l'une à l'autre, changeaient
les conditions d'établissement.
Toute petite et toute pénétrée de rades, Malte
fut toujours occupée et maintenue sans peine par
une garnison de quelques centaines d'hommes et
par une station de quelques vaisseaux. La Crète
n'offre à l'étranger qu'un port naturel, la Sude,
qui, sous une presqu'île avançante, reste extérieur
à la masse de l'île, tout en étant dominé de tous
côtés par les insulaires. Et la Crète, derrière un
étroit rivage, est un triple et énorme bloc de hautes,
très hautes montagnes, de Monts Blancs dépassant
2 000
mètres d'altitude, où la résistance indigène
trouva toujours un refuge inexpugnable.
L'étranger, possesseur des côtes, ne put jamais s'y
maintenir que par un cercle continu de grandes et
de petites forteresses pour la défense contre l'inté–
rieur, par une ronde perpétuelle do grands et petits
bateaux pour la défense extérieure et le ravitaille–
ment. Ce que l'occupation de ces côtes dangereuses
exige de matériel et de personnel naval, de science
et d'expérience de la navigation, d'argent et de res–
sources, Venise l'a su durant trois siècles, et les
amiraux des puissances en 1897-1898 : encore les
Crétois d'alors n'étaient-ils contre ces délégués de
l'Europe que sur la défensive; pourtant six ou sept
cuirassés, une dizaine de croiseurs, autant de torpil–
leurs suffisaient à peine à la besogne quotidienne...
Les Turcs, de 1669 à 1770, avaient tenu la Crète
parce qu'ils étaient une grande puissance navale.
En 1770, les Russes, pilotés par des Anglais, brû–
laient la flotte turque à Tchesmé : en 1771, commen–
çaient les révoltes Cretoises que, durant un siècle et
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