7 2
L A MOUT DE STAMBOUL
nique et Beyrouth, entre Stamboul et Tripoli : en
ce détroit de Bhodes, ils avaient grand'raison de
prévoir la prochaine affluence des vapeurs et des
longs courriers, qui, des terminus balkaniques, Salo-
nique ou le Piréo, se presseraient vers la bouche du
canal de Suez. Si la Turquie voulait redevenir une
puissance navale, la Corne d'Or devait être son
arsenal, et Marmaris, son point d'appui, son Gibral–
tar ou son Bizerte... Mais la Jeune Turquie pou–
vait-elle, devait-elle acquérir une flotte de guerre?
L'affaire Cretoise,
—
et voilà peut-être ce qu'elle
avait de plus grave pour la Turquie, — obligeait les
Jeunes-Turcs à se poser cette question et à y répondre
tout de suite, sans leur laisser le temps d'en voir
les conséquences pour l'équilibre de leur budget et
pour la sécurité de leur empire.
Si l'on voulait continuer la politique khalifale en
Crète, i l fallait assurément une flotte, et une nom–
breuse flotte de gros et de petits vaisseaux, et une
flotte coûteuse, toujours en mer, en croisières, en
risques et en réparations.
La Crète est une île de haute mer, et la Crète est
une île sans ports. Au carrefour de toutes les routes
maritimes qui coupent la Méditerranée levantine,
elle a toujours été une autre Malte que convoitaient
les maîtres de la mer, les « thalassocrates » du j our :
depuis quarante siècles, depuis le temps où les
Pharaons avaient des préfets dans les « Iles de la
Très Verte » et où le Phénicien Kadmos arrivait chez
Minos, la Crète, autant que Malte, a connu la domi–
nation des « Peuples de la Mer ». Mais entre Malte
et la Crète, ces Peuples ont toujours constaté quel-
Fonds A.R.A.M