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L A M O R T D E
S T A M B O U L
l'Europe les laissant faire et les Turcs s'apprêtant à
les en empêcher, c'est encore la malheureuse Grèce
qui, pendant trois années et demie (mai 1909-octo-
bre 1912), allait supporter les conséquences de la
querelle.
+
La Vieille Turquie avait eu deux ou trois raisons
de tenir à la Crète ; la Jeune Turquie avait les mêmes,
et deux ou trois autres avec.
Dans la Crète, la Vieille Turquie voyait la plus
récente et la plus illustre, peut-être, de ses con–
quêtes.
C'est à la fin du xvir
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siècle seulement, alors que
leur avancée en Europe commençait de tourner à la
retraite, c'est après la déroute de Vienne (1683),
après la perte définitive de la Hongrie et de la Tran–
sylvanie, après une première évacuation de Belgrade
et d'Azof, c'est au début de leur décadence que les
Turcs avaient chassé les Vénitiens des dernières
places de l'Ile : ils les avaient assiégées près d'un
siècle.
La plus grande de ces places, la capitale, Candie,
les avait retenus vingt-cinq années (16M-1669). La
prise de Candie avait mis le comble à leur réputa–
tion militaire. Vingt-cinq années durant, les deux
moitiés de l'univers d'alors, le monde islamique et
le monde chrétien, avaient célébré la science de
leurs ingénieurs et le courage de leurs janissaires.
Chez l'Infidèle, ce fait d'armes avait causé les
mêmes angoisses qu'un siècle plus tôt la prise de
Fonds A.R.A.M