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L A M O R T D E
S T A M B O U L
Elle tomba dans l'anarchie (1892-1896) : le
vali
musulman régnait en maître absolu ; i l accordait aux
beys,
aux
agas,
à l'islam indigène et à ceux des chré–
tiens qui en étaient les associés politiques, pleine
licence d'user et d'abuser de tout; mais afin d'éviter
la révolte ouverte, i l laissait aussi le gros des chré–
tiens en prendre à leur aise avec les lois et les impôts.
Dès 1894, les caisses vides et le brigandage généra–
lisé empêchaient de pousser l'expérience plus avant.
Les nouvelles d'Arménie, r épandue s par les consuls
anglais, relevaient les espoirs des montagnards; on
disait l'Angleterre disposée à réclamer la constitu–
tion crétoise. Le Sultan, sous la pression des puissan–
ces, dut envoyer à nouveau un gouverneur chrétien.
Aussitôt les musulmans, excités par Abd-ul-Hamid,
entrèrent en campagne contre ce « délégué de l'Eu–
rope », bien résolus à l u i rendre la place intenable
1
.
Cette lutte des
beys
et d'Abd-ul-Hamid contre
l'Europe se poursuivit durant toute l'année 1896*.
1.
Cf. les dépêches du
Livre Jaune,
18
août, 4 septembre, 18 et
1!)
septembre 1895 : <• Tous les meurtres commis par les musul–
mans, toutes les violences, tous les actes arbitraires, reprochés
aux fonctionnaires ou ù la gendarmerie turcs, sont la consé–
quence d'un plan arrêté qui a pour but d'exaspérer les chrétiens,
de les pousser à bout et de prouver ainsi l'inutilité d'un gouverneur
chrétien. Chez les Cretois toute démonstration de mécontentement
est toujours appuyée par une série d'attentats contre les personnes;
on pouvait prévoir que nous allions traverser une période d'assas–
sinats entre musulmans et chrétiens : en quelques jours, qualre-
chrétiens étaient tués dans la province de Sélino, tandis qu'un
autre chrétien était assassiné aux portes mêmes de la Canée.
Ces assassinais ont été ordonnés par le
Comité musulman de la
Canée;
l'ordre aurait été porté par un sergent musulman de
gendarmerie et exécuté aussitôt par ses deux fils. »
2.
«
L
'
attitude des
beys,
écrivait le consul de France à la Canée,
me confirme de plus en plus dans l'idée qu'ils obéissent à un
mot d'ordre envoyé de Constantinople. »
Fonds A.R.A.M