L A C R È T E E T L E K H A L I F A T
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bourreau des (Jrétois. A plusieurs reprises, les gens
d'Athènes eussent volontiers déclaré la guerre à
Constanlinople : en 1866-1868 surtout, lintcrven-
tion des puissances occidentales avait été néces–
saire; l'ultimatum turc était déjà remis (11 décem–
bre 1868). Mais en 1878, l'hellénisme se découvrait
un ennemi plus redoutable et des risques bien plus
grands : au traité de San Stéfano, la Russie avait
dessiné la carte de sa Grande Bulgarie; Roumélie
et Macédoine, presque tout le domaine de l'Idée en
Europe y était annexé; Salonique était revendiquée
par les Slaves, Constantinople menacée par eux; si
le Bulgare parvenait quelque jour à ses fins, c'en
était fait de l'avenir grec... Du coup, les regards de
l'hellénisme se détournèrent, de la Crète, vers la
Macédoine et la Roumélie, et sa haine se porta du
Turc sur le Bulgare.
La doctrine d'Athènes fut désormais que toute
affaire Cretoise porterait préjudice à l'Idée. Le Pacte
de Khalépa n'assurait aux Crétois qu'un minimum
d'autonomie ; mais i l assurait à l'hellénismç son plein
avenir de ce côté : le temps allait travailler dans
l'île à la victoire définitive du chrétien sur le musul–
man, à la reconquête chrétienne de toutes les terres,
des villes même s ; dans dix ans, vingt ans, un demi-
siècle au plus, la Crète ne pourrait plus manquer
d'être grecque; avant cette date, toute insurrection
vaincue ferait reculer l'échéance dernière; toute
insurrection victorieuse, annexant les Crétois au
royaume, aurait son revers immédiat en Turquie
d'Europe; les Slaves, appuyés par la Russie, y récla–
meraient une compensation pour cet accroissement
de l'hellénisme : « La Crète aux Grecs; la Roumélie
LA MOUT DE STAMDOUL.
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Fonds A.R.A.M