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L A M O R T
ni:
S T A M B O U L
flamber au grand jour la haine gréco-bulgare que,
seule, la consigne turque avait durant quatre siècles
recouverte.
Le Turc en resta le modé r a t eu r ou l'excitateur à
son g r é . étant l'arbitre entre les deux orthodoxies,
puisque son bon plaisir, rien que son bon plaisir,
décidait de l'attribution des diocèses et que ses seuls
bérats
pouvaient installer les évêques du Patriarche
ou de l'Exarque dans l'administration des biens
ecclésiastiques.
La Russie panslaviste intervint une troisième fois.
Par la guerre des Balkans (1878), elle prit de force
aux Turcs quelques-uns des diocèses bulgares et
elle en lit un Etat bulgare autour de Sofia, capitale
d'une principauté vassale de la Porte : c'est tout
pareillement qu'autrefois on avait pris à l'Empire
turc des diocèses serbes ou grecs pour en faire un
Etat serbe et un État grec. Le nouvel État bulgare
échappait à l'administration turque, mais i l échap–
pait aussi aux ambitions rivales de l'Idée serbe et de
l'Idée grecque : héritière de la Rome byzantine,
Athènes, — c'était l'Idée grecque, — englobait déjà
tous les « Roumis » ottomans dans les frontières de
son futur empire hellénique; première-née. à l'indé–
pendance parmi les Slaves méridionaux, Belgrade,
c'était l'Idée serbe, — englobait, par contre, tous
les Slaves ottomans, et beaucoup d'autres, dans les
frontières de sa Grande Serbie.
La création de l'Etat bulgare fit donc naître une
haine presque aussi forte entre Sofia et Belgrade
qu'entre Athènes et Sofia. La brouille mortelle de
tous ces Balkaniques devint l'une des meilleures
sécurités de la Turquie d'Europe : Abd-ul-Hamid,
Fonds A.R.A.M