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T.A MORT DE STAMROUL
rendus pendant l'occupation européenne. Mais à
cette ouverture de la session de 1910, les députés
musulmans protestent. Les députés chrétiens écou–
tent en silence, puis prêtent le serment que, depuis
deux ans, la Crète entière a prêté deux ou trois fois
déjà : « Au nom de la Sainte-Trinité, nous jurons foi
à la patrie et au roi constitutionnel, obéissance à la
Constitution et aux lois de l'État... » Les députés
musulmans s'abstiennent et personne ne leur en fait
un grief. Mais l'un d'eux dépose une seconde protes–
tation qui, celle-là, est mise en pièces par un éner-
g umè n e — i l s'en trouve dans toutes les assemblées
et ce Crétois a l'excuse de compter parmi ses grands-
pères un pallikare écorché vivant par les Turcs — :
l'Assemblée entière censure le geste, déclare que les
députés musulmans seront toujours libres d'expri–
mer leur opinion et demande la remise et le dépôt
de la protestation
l
.
1.
I l n'est pas douteux que cette scène ait été d'avance com–
binée sur les instructions de Constantinople, tout comme au
temps d'Abd-ul-IIamid étaient combinés les massacres de chré–
tiens. On écrit de la Canée au
Temps,
le 16 mai 1910 :
«
Le règlement de la Chambre crétoise ne permet pas la dépo–
sition d'un acte quelconque avant la constitution du bureau;
pourtant on avait reçu leur première protestation. Quel sens
avait dans ces conditions la déposition, à moins de cinq minutes
d'intervalle, d'une seconde protestation d'une portée moins géné–
rale que la première? Notez qu'on n'avait pas même demandé
aux musulmans de prêter serment.
»
Le décret proclamant les élections était publié au nom du
roi des Hellènes; cela n'a pas empêché les musulmans de
prendre part aux élections, alors qu'ayant des collèges spéciaux,
ils auraient pu s'abstenir sans danger de voir des chrétiens élus
comme leurs représentants. Tout ceci conduit à la conclusion que
l'incident était prévu, et qu'on avait spéculé sur la nervosité des
députés chrétiens.
»
De même, pour le texte de la seconde protestation ; « Nous,
Fonds A.R.A.M