LA CItÈTE ET L E K H A L I F A T
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coup de surprise auquel les gens d'Athènes n'avaient
pas eu la moindre part.
Mais en novembre 1908, les voyages du roi
Georges à travers les chancelleries, ses instances
pour l'union auprès des Cours amies ou parentes,
les promesses, qu'il se vantait d'avoir reçues de
Paris, et, surtout, ses longues et mystérieuses négo–
ciations à Rome avaient inquiété les Jeunes-Turcs :
entre Athènes et Rome, ils avaient vu depuis 1906
s'établir la même intimité suspecte, la même dépen–
dance qu'entre Relgradc et Sofia, d'un côté, Vienne
et Pé t e r s bou r g de l'autre. Les trois puissances, qui
entouraient de plus près l'Empire ottoman, — Italie,
Autriche et Russie, — semblaient, revendiquer sur
la Balkanie les mômes droits de « voisinage » que
la France et l'Espagne sur le Maroc; depuis 1907,
déjà, leurs trois ministres, MM. Tittoni, d'Aehrenthal
et Isvolski semblaient s'être réciproquement reconnu
et attribué, comme « sphères d'influence », les trois
chrétientés balkaniques, la bulgare à la Russie, la
serbe à l'Autriche, la grecque à l'Italie, dont chacun
pensait se faire un instrument contre la tranquillité
ou l'indépendance de la Turquie d'Europe. Or, en ce
mois de novembre 1908, M. Tittoni disait bien haut
que la Bosnie autrichienne comportait une compen–
sation pour les Italiens, et cette compensation, les
Jeunes-Turcs devinaient, trois ans d'avance, où
l'Italie comptait la prendre : mieux que jamais, ils
voyaient dans la Crète grecque un prélude à Tripoli
italienne...
Leur défiance contre les Grecs s'était changée en
haine à la faveur des élections. Dans son parlement,
la Jeune Turquie avait paru vouloir attribuer un
L A MORT DE S T A M B O U L .
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Fonds A.R.A.M