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LA MORT DE STAMBOUL
Los r é f o r me s veulent être élaborées selon le t e m p é r a m e n t
et l'Ame d'un peuple. Elles doivent non seulement r é p o n d r e
à ses besoins ma t é r i e l s , intellectuels et mo r a u x ; elles doi–
vent encore s'approprier à l'esprit de ceux q u i sont c h a r g é s
de les appliquer : « La l o i , d é c l a r e n t les
Droits de l'Homme,
est l'expression de la volonté g é n é r a l e . . . Elle doit être la
m ê m e pour tous. » Je voudrais v o i r ce principe respecté
dans mo n pays afin que les r e m è d e s à employer prennent un
caractère national.
Par national, je n'entends point : exclusivement turc. Je
suis Turc et très fier de l'être; mais je renoncerais à être le
citoyen d'un gouvernement turc où ma race ne serait heu–
reuse que par le malheur des autres...
Mais en ce dernier point, les disciples et collabo–
rateurs d'Ahmed-Riza modifièrent un peu la doc–
trine, pour la faire passer dans la pratique. Ils étaient
Turcs et très fiers de l'être; ils étaient Jeunes-Turcs
et très jeunes : ils voulaient être les citoyens ou,
plutôt, les maîtres d'un empire jeune-turc où leur
race et leur coterie seraient puissantes par l'asser–
vissement des autres nationalités. Ils se croyaient
forts, et ils voulaient user de la manière forte. Ils se
croyaient les serviteurs de la science et de la vertu,
et ils voulaient le triomphe éclatant de la vertu et
de la science. La contre-révolution du Treize Avril
leur avait brusquement révélé les difficultés de cette
entreprise.
En juillet-août 1908, ils avaient rencontré la facile
adhésion de quelques gens de mosquée des plus
respectables; les
sai-iklis,
les « en t u r banné s » de
poids et de marque n'avaient eu aucune hésitation à
entrer, non seulement dans les comités
Union et
Progrès,
mais encore dans les loges maçonniques :
tel d'entre eux, vénérable, dit-on, de la loge
Mace-
Fonds A.R.A.M