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LA. MORT DE STAMBOUL
nementale et d'admettre deux s o u v e r a i n e t é s opposées dans
l'Etat; actuellement, la Turquie ne peut n i se s é p a r e r du
Khalifat, n i le séparer de son pouvoir temporel ' .
L'union du Sultanat et du Khalifat restait donc
aux yeux des Jeunes-Turcs la condition du salut de
l'empire : ils voulaient réformer leur Sultanat par
le moyen de leur Khalifat : « I l existe en Turquie de
nombreux et précieux éléments de p r og r è s ; i l faut
les mettre en œuv r e ; mais i l faut les développer
avant de les régler : le progrès, selon la belle expres–
sion d'Auguste Comte, n'est que le développement
de l'ordre. » La religion de Mahomet leur semblait
et le fondement le plus solide de l'ordre et l'instru–
ment le plus commode de progrès :
Les p r o g r è s é n o r m e s , réalisés par les musulmans au
moyen âge', dans toutes les branches de la connaissance
humaine, sont là qui prouvent m a t é r i e l l e m e n t que ce n'est
point le Coran q u i a c o n d a m n é la Turquie à l ' i mmo b i l i t é .
L'Islamisme, q u i a accepté d'emblée et sans fanatisme tout
ce que les civilisations a n t é r i e u r e s , g r é c o - r om a i n e , persane
et hindoue, avaient produit de grand et qui a porté en peu
de temps ces richesses de l'esprit h um a i n à u n si haut d e g r é
de perfection, l'Islamisme q u i conseille à ses adeptes « d'aller
à la recherche de la science, fût-ce au delà de la Chine », et
qui leur a dit : « Partout où vous trouverez une vérité,
prenez-la : elle appartient à l'Islam », ne peut pas être réfrac-
taire à l'expansion des l um i è r e s de l'intelligence
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.
Si l'on voulait que l'Islam acceptât la science
européenne, comme jadis i l avait accepté « d'emblée
et sans fanatisme, tout ce que les civilisations anté-
1.
La Grise de l'Orient,
p. 21-24.
2.
Id.,
p. 14.
Fonds A.R.A.M