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INTRODUCTION
de prendre le Maroc; les officieux, à qu i la pénétration
pacifique ne suffit plus, nous invitent déjà à « envisager
l'hypothèse d'une action mi l i t a i r e » . En novembre 1909,
ils écrivent : « Nous avons occupé les Châouïa avec moins
de 15 000 hommes, les Beni-Snassen avec moins de 10000.
Si jamais il fallait, pour sauver les existences menacées des
Européens, occuper Fez, 10000 hommes y suffiraient.
I l n'est
d'ailleurs pas question de cela, et c'est fort heureux.
Mais i l ne faut pas habituer l'opinion à croire à des
difficultés, qu i en réalité n'existent pas
1
. »
C'est à s'acquérir tous les consentements ou toutes
les tolérances pour cette entreprise que, depuis dix-huit
mois, notre diplomatie a travaillé. Les autres considé–
rations n'ont presque pesé pour rien dans sa conduite.
Mes lecteurs savent que j ' a i toujours fait au Maroc sa
juste place dans le calcul de nos intérêts nationaux : je
sais qu'ayant une France a l g é r i e n n e , c'est d'intérêts
français, de frontière française qu'il s'agit, quand nous
ne voulons pas qu'un foyer d'anarchie, de guerre reli–
gieuse et d'intrigues é t r a n g è r e s s'installe ou subsiste à
notre porte, et je vois toute la distance qu'il y a du
Maroc au Mexique.
Mais les affaires marocaines étaient-elles la question
principale pour la France de 1908-1909? Les financiers,
s p é c u l a t e u r s et concessionnaires ont hâte de rentrer
dans leurs avances et de se jeter sur la proie liée; les
Jecker d'aujourd'hui trouvent dans notre Chambre —
et presque à la même place — les môme s patrons que
dans le Corps Législatif d'autrefois; ces faiseurs et
défaiseurs de ministres importunent, tracassent, assour–
dissent de leurs r é c l ama t i o n s et de leurs journaux à
gages, finissent par .entraver et e n t r a î n e r les directeurs
responsables de notre diplomatie....
Mais n'est-il pas des heures où le souci de la France
1.
Le Temps,
Bulletin de l'Étranger, n° du 24 novembre 1909.
Fonds A.R.A.M