LA TURQUIE ET LE TANZIMAT.
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selon ses instructions, relever de la justice italienne et en
ce moment-là, le Sultan qui voulait intervenir, était bien
mal venu de se dire suzerain de l'État beylical (1).
L'on conçoit que la Prusse se soit efforcée d'ébranler en
Orient le crédit d'un adversaire qu'elle n'avait pas encore
complètement abattu. Tout au plus pouvait-on discuter la
moralité des moyens qu'elle employait dans ce but. La
propagande islamique qu'elle suscita en Algérie, fut en
partie l'œuvre d'un pacha que la Porte, sur ses conseils,
envoya secrètement à Tripoli au mois de décembre 1870.
Le parti de Joseph Karam au Liban reçut des encoura–
gements du consul prussien de Beyrout et l'on eut toute
raison de craindre qu'il n'essayât de détruire dans la
Montagne, grâce à cet appui, l'organisation qui avait suivi
l'occupation française de 1860.
L'on s'aperçut aussi que l'ambassade britannique à Cons-
tantinople cherchait à desservir la France en Syrie par
l'intimité de ses rapports avec le nouveau gouverneur
Rustem-pacha.
La Porte ne pouvait assister d'un œil indifférent à toutes
ces menées dirigées contre la puissance à laquelle l'Europe
avait précédemment laissé la haute main dans les affaires
d'Orient. Pendant les premiers temps de la guerre occiden–
tale, elle avait observé à l'égard de la France une neu–
tralité sympathique, alors que déjà dans plus d'un État
voisin l'on faisait obstensiblement des vœux pour le succès
définitif des Allemands. Mais bientôt l'entente qui parais–
sait s'établir entre la Prusse, la Bussie et l'Autriche l'avait
(1)
L'on se rappelle qu'en 1882 l'Italie opposa un moment au pro–
tectorat tunisien de la France les droits de suzeraineté du Sultan.
V
Fonds A.R.A.M