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T U R Q U I E E T L E T A N Z I M A T .
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l'opinion d'autrui
et qui ne craint pas d'avoir recours à la
corruption, quand elle ne peut arriver à son but par la
persuasion...
»
Aucun gouvernement n'a d'ailleurs autorisé
d'une manière absolue la propagande religieuse. Partout,
en Angleterre, en Prusse, en Autriche, elle est soumise à
la surveillance des autorités. Les gouvernements les plus
libéraux et les plus tolérants se sont réservé la faculté de
sévir contre elle, toutes les fois qu'elle menacerait la sécu–
rité publique et les intérêts de la religion de l'État. La
Grèce démocratique vient d'inscrire en tête de sa consti–
tution la prohibition du prosélytisme et de toute autre
intervention contre la religion dominante... »
Ces explications mesurées concordaient au fond avec les
idées et le sentiment de l'éminent ministre et de l'ambas–
sadeur auxquels elles étaient destinées. Mais elles renfer–
maient une leçon intentionnelle à l'adresse des clergymen
qui, suivant l'expression d'Ali-pacha, avaient entrepris
une véritable croisade contre l'islamisme et entendaient
combattre « les superstitions mahométanes ».
En réalité ces fervents apôtres de la foi protestante qui
réclamaient ingénuement la
liberté sacrée de conscience,
c'est-à-dire la liberté des convictions, étaient aussi intolé–
rants et par suite aussi inconséquents que l'avaient été les
premiers réformateurs vis-à-vis du catholicisme taxé par
eux d'intolérant et de fanatique.
A une certaine époque, au milieu de XVII
e
siècle, lors–
que la politique des rois de France travaillait ouvertement
à la réunion de l'église de Constantinople à celle de Rome,
le Saint-Siège, afin de se ménager, sinon l'appui, du
moins l'indifférence des musulmans, avait formellement
défendu à tout missionnaire de tenter leur foi originelle.
Fonds A.R.A.M