LA TURQUIE ET LE TANZIMAT.
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elle est d'un recouvrement relativement facile. Mais elle est
devenue, pour le paysan, la cause de vexations et d'avanies
telles que des musulmans ont pu dire dans un document
rendu public : « Si l'Europe pouvait savoir ce que ces
mots, qu'on lit parfois dans les journaux : le vilayet de
vient d'envoyer au ministère des finances la somme de
racontent de misères, de désespoirs et de mauvais traite–
ments, elle serait épouvantée (1). »
Comment remplacer la dime par une taxe foncière dans
un pays qui n'a pas de cadastre et où un cadastre sérieux
ne saurait exister de longtemps? Ne pourrait-on du moins
admettre la faculté d'acquitter cet impôt sous forme de r e –
devance fixe calculée d'après une moyenne de cinq à dix
ans de revenus? Une fois le choix fait, il devrait être défi–
nitif. Ce serait une sorte d'abonnement valable pour un
laps de temps déterminé et qui dans ses renouvellements
périodiques, suivrait nécessairement la progression de la ri–
chesse nationale. On respecterait ainsi de vieilles traditions,
tout en falicitant le passage à un régime de moins en moins
imparfait.
Au fond, si défectueuse qu'apparaisse l'administration
fiscale et quels que soient ses lacunes et ses vices, c'est
surtout l'outillage du mécanisme lui-même qui fait défaut
c'est-à-dire un personnel honnête et compétent pour mettre
ce mécanisme en action. Là surtout est la cause du désor–
dre dans les finances, de l'appauvrissement du trésor otto–
man et de son profond discrédit. Le seul moyen de remé–
dier pour l'instant à cette désolante et honteuse pénurie,
(1)
Ce passage est extrait d'un manifeste « des patriotes musul–
mans » paru sous la date du 9 mars 1876,
Fonds A.R.A.M