LA TURQUIE ET LE TANZIMAT.
Un journal de Constantinople, par une prescience sin–
gulière, caractérisait ce régime de dépendance en suppo–
sant une province brusquement séparée de l'Empire par
voie de conquête. « L'envahisseur, disait-il, n'aurait qu'à
se substituer à l'État et en vertu des lois qui régissent la
propriété, il pourrait légitimement saisir et enlever aux
populations qu'il aurait intérêt à éloigner du pays, les ter–
rains
miriès
qu'elles détiennent. »
Le gouvernement s'était préoccupé maintes fois de la né–
cessité de transformer la propriété sur la base du
dominium
plénum,
tout en reconnaissant qu'en en facilitant le libre
usage et la transmission, le Trésor ne pouvait qu'y gagner.
Il lui paraissait évident qu'au point de vue fiscal, les droits
de mutation remplaceraient avantageusement les maigres
produits du
Tapou
(1),
qu'une bonne loi sur les hypo–
thèques permettrait l'établissement d'un crédit foncier et
aurait pour effet de soustraire la petite culture au joug des
usuriers, que d'ailleurs l'immigration à laquelle les restric–
tions légales mettaient obstacles, viendraient fournir des
bras à la terre et des contributions au
Mallièh.
Mais en songeant aux moyens qui devaient préparer un
changement aussi radical, le Divan s'arrêtait à plus d'une
objection. Les
Vakoufs,
pas plus que les
Miriès,
ne pou–
vaient être assimilés aux biens libres ou
Mulk,
sans que
l'on indemnisât au préalable toutes les parties intéressées ;
il fallait racheter à qui de droit la nue-propriété de ces
immeubles, ainsi que les servitudes que leurs détenteurs
nées, dans le territoire des confins militaires austro-hongrois. Y.
Revue
des Deux-Mondes
du 1
er
novembre 1869.
(1)
I, 208.
Fonds A.R.A.M