LA TURQUIE ET LE TANZIMAT.
101
L'argument emprunté à l'histoire était en contradiction
évidente avec les visées de la Porte. Les capitulations
n'avaient point été consenties à titre purement gratuit
et si elles semblaient constituer dans leur forme originelle
une « prestation unilatérale » plutôt qu'un traité engageant
à la fois les parties, il n'en était pas moins certain que les
droits reconnus au premier souverain étranger, n'avaient
été que le prix de son alliance et l'équivalent des services
qu'il avait rendus. Imparfait en apparence, l'acte impérial
était au fond un véritable traité. D'ailleurs la capitulation
de 1535 délivrée à François I
er
et qui a servi de modèle à
toutes les autres, avait été renouvelée par Mahmoud I
er
et
pour ses successeurs
et de nombreux traités politiques et
commerciaux en avaient postérieurement confirmé les
clauses.
Il ne fut pas difficile au gouvernement français de dé–
montrer la valeur essentiellement contractuelle de ses ca–
pitulations depuis 1740 et surtout depuis le traité si expli–
cite de 1802 (1), et la plupart des autres puissances ne se
firent pas faute d'invoquer contre la Porte les titres ana–
logues dont elles étaient en possession. La Russie seule ne
parut prendre aucun intérêt à la défense des immunités
européennes en Turquie ; elle comptait peu de nationaux
proprement dits dans l'Empire et sa clientèle officieuse se
composait surtout de chrétiens sujets ottomans auxquels
les capitulations ne sont point applicables.
Vers la fin de l'année 1871, le ministre de la justice
(1)
Le traité français de 1802 porte à l'art. 2 : « Les traités ou ca–
pitulations qui, avant l'époque de la guerre, déterminaient respec–
tivement les rapports de toute espèce entre les deux puissances, sont
entièrement renouvelés. »
Fonds A.R.A.M