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LA TURQUIE ET LE TANZIMAT.
La réaction, comme le prévoyait Reschid, profita de ces
circonstances pour lever la tête, et ce fut Kosrew-pacha
qui lui servit d'instrument. Le vieux vizir qui siégeait
nominalement dans le conseil, n'avait point répondu à la
confiance de ses collègues ; son fanatisme s'était peu à peu
réveillé et, secondé par quelques hauts fonctionnaires, i l
avait conçu l'idée et mûri le plan d'un véritable complot
anti-réformiste dirigé contre Reschid-pacha et ses princi–
paux partisans.
Prévenu à temps de ses projets, le Sultan le destitua.
L'intrigue fut ainsi décapitée ; mais le chef disparu laissait
des adeptes d'autant moins découragés, qu'ils crurent voir
dans la rigueur d'Abdul-Medjid l'œuvre directe de son en–
tourage et par conséquent une preuve nouvelle de la dé–
pendance morale et de la faiblesse du souverain.
Ils ne se trompaient pas. Peu après le renvoi de Kos–
rew-pacha, le Sultan, circonvenu par le parti turc, sacrifia
son principal ministre à la haine de ses ennemis.
Cependant la retraite de Reschid-pacha fut de courte du–
rée. La révolution de février 1848, qui l'avait encore trouvé
au pouvoir, venait d'avoir son contre-coup dans l'Empire.
De graves désordres avaient éclaté en Valachie et l'on était
menacé d'une occupation moscovite. D'un autre côté une
vive agitation se manifestait parmi les rayas et i l y avait
lieu d'appréhender que, gagnés par le courant qui envahis–
sait les principaux États occidentaux, ils ne cherchassent à
secouer leur joug comme les Italiens en Lombardie.
Le Sultan comprit qu'il devait s'entourer des hommes
les plus aptes à la conduite dos affaires. Riza-pacha fut
préposé à la guerre et Reschid-pacha, nommé d'abord
ministre sans portefeuille, reprit bientôt possession du
Fonds A.R.A.M