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LA TURQUE ET LE TANZIMAT.
ment méthodique, Reschid-pacha apportait néanmoins une
certaine suite dans la transformation graduelle des princi–
paux services- publics. Après avoir doté l'administration
financière du système français des receveurs et percep–
teurs, il voulut créer, comme en France, une banque
d'État qui serait autorisée à émettre du papier remboursa–
ble dans un certain laps de temps. Ici ses collègues du
Conseil se récrièrent : « Vous consommerez la ruine de
l'Empire, lui fut-il dit, en prétendant lui imposer sans tran–
sition, sans ménagements les institutions compliquées des
nations étrangères. » Le fougueux ministre insista et fit
prévaloir son projet.
Son énergie paraissait ne plus connaître d'obstacles. I l
poursuivait sans pitié les faits de concussion et d'abus de
pouvoir, ne négligeant aucune occasion d'affirmer le prin–
cipe de l'égalité de tous les sujets de l'Empire. Nul ne devait
l'oublier et tel était à cet égard son ferme propos, qu'il fit
voter en Conseil l'érection de deux colonnes commémorati-
ves sur lesquelles serait gravée la charte du 3 novem–
bre 1839.
Il entendait faire sentir l'impulsion de sa main jusque
dans les régions les plus éloignées de la capitale ; deux
commissaires pris dans le corps des Ulémas furent envoyés
l'un en Asie, l'autre en Europe pour inspecter les pro–
vinces, expliquer le Hat au peuple et rendre compte de
ses impressions.
Cette activité fiévreuse froissait singulièrement les habi–
tudes de lenteur, de prudence et de temporisation propres
à l'administration ottomane. Le grand vizir se tenait à
l'écart, voulant sans doute laisser peser sur son jeune col–
lègue toute l'impopularité de sa précipitation.
Fonds A.R.A.M