LA TURQUIE ET LE TANZIMAT.
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il avait un souci jaloux de son autorité et à ses yeux la ré–
volution du 15 juin devait avant tout relever et affermir
son double prestige de Calife et de Prince. Un traité sur
l'obéissance au Padischah qu'il avait fait rédiger par le
Scheik Ul Islam, révélait clairement cette pensée de despote
farouche. C'était un recueil comprenant vingt-cinq
tradi–
tions-oracles
des prophètes qui formulait entre autres cette
curieuse proposition: « Quand bien même le Prince des
fidèles serait un Ethiopien difforme, il faudrait lui obéir.
S'il tyrannisait ses sujets, ceux-ci devraientprendrepatience.
Mais s'il altérait la vraie croyance, on devrait l'immoler. »
Mahmoud avait cependant cédé à un entraînement géné–
reux le jour de la défaite des Janissaires. « Je veux, avait-il
déclaré au Reis-Effendi(l), que désormais le trône ne soit
plus l'effroi du peuple, mais son appui. J'abolis la confisca–
tion et même j'entends laisser aux enfants des rebelles les
dépouilles de leurs pères. » Ce bon propos fut confirmé
peu après par un Edit qui évoquait avec plus ou moins de
raison le souvenir des maux dont les exécutions de
l'EtMei-
dam
avaient délivré le pays. « L'audace et l'insubordination
des Janissaires, y était-il dit, les ayant portés à tous les
excès, leurs exigences exorbitantes ont amené l'épuise–
ment du trésor des fidèles. Parmi les désordres qui en ont
été la conséquence, celui de la saisie et des inventaires de
succession par le' fisc doit être considéré comme le résultat
de la nécessité de couvrir le déficit provenant des prodi–
galités faites en faveur des Janissaires. Maintenant qu'ils
n'existent plus, la Sublime Porte et tous les musulmans
se trouvent à l'abri de la violence de la dite milice ; la dissi-
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Chancelier d'Etat, ministre des affaires étrangères.
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Fonds A.R.A.M