L'interrogatoire
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que de tous les déportés d'Erzingian il ne restait qu'un survivant:
Martirossian. Au début de juin, l'ordre fut donné à la population de
se tenir prête à quitter la ville. On nous fit également savoir que notre
argent et nos objets de valeur pouvaient être remis en garde aux
autorités. Trois jours plus tard, tôt le matin, la population dut aban–
donner ses foyers...
Le président:
En grand nombre?
L'accusé:
Dès que vint l'ordre de quitter la ville, la population fut rassemblée
et parquée en dehors de la ville. Puis, divisé en caravanes et en colon–
nes, le convoi se mit en marche.
Le président:
La population avait-elle le droit d'emporter ses affaires, ses
biens?
L'accusé:
On n'emportait que ce qu'on pouvait porter à la main car nous
n'avions pas de chevaux à notre disposition.
Le président:
Votre famille avait-elle un chariot où charger ses affaires?
L'accusé:
D'abord, nous avions un cheval, mais dès le début des hostilités on
nous l'a pris et nous achetâmes un âne.
Le président:
I l devait transporter vos bagages, car vous n'aviez pas de cha–
riot.
L'accusé:
Nous avions encore une charrette à bœufs.
Le président:
Pendant combien de jours avez-vous marché?
L'accusé:
Je ne saurais le dire. Dès le premier jour, mes parents furent tués.
Le président:
Quelle était la direction?
L'accusé:
Le sud.
Le président:
Qui escortait le convoi?
L'accusé:
Des gendarmes, des soldats à cheval, et d'autres soldats.
Le président:
Etaient-ils nombreux?
L'accusé:
Des deux côtés de la route.
Le président:
Devant et derrière?
L'accusé:
Des deux côtés.
Le président:
Pour empêcher qu'on ne s'éloignât?
L'accusé:
Oui.
Fonds A.R.A.M