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G É O G R A P H I E D E L ' A R M É N I E E T L ' H I S T O I R E
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les sources de l ' Ar a x e et celles de l ' Euph r a t e , dans l'ancien canton
de Ha v t c h i t c h , dépendant de la province du Touroubéran. Te l
encore, plus au nord-ouest, dans l'ancien district de Mardatt, la
«
table de T e kma n », avec ses plateaux noirs « couverts de fenouil
jaunâtre et d'une maigre flore steppique donnan t de médiocres
pâturages ». A u nord de ces plateaux, entre eux et la chaîne du
Kop - dagh ou le massif du Ka n d i l - d a g h , Erzeroum, la Theodo-
siopolis byzantine, la K a r i n arménienne, est le p o i n t de j o n c t i o n
des pistes qu i relient la vallée du Qara-sou supérieur, c'est-à-dire
du hau t Euph r a t e , aux sources de l ' Ar a x e . E n d'autres termes,
c'est le p o i n t de j o n c t i o n entre l'ancienne Arménie romaine et
l'ancienne Persarménie, d'où le rôle considérable de l'antique
cité et de la province située plus à l'est, d o n t elle défend l'accès.
La bonne terre arménienne
A côté de cette Arménie pittoresque, — celle des sommets
et des hauts plateaux — , l'Arménie utile. Cette dernière est
essentiellement constituée par d'anciens bassins où la mer
miocène, en se r e t i r a n t , laissa des chapelets de lagunes. A u
Pliocène, quand la régression marine f u t achevée, ce régime lagu-
naire parsemait t ou t e l'Arménie. A u Quaternaire les anciens lacs
se vidèrent. Te l f u t le cas pour la plaine de l ' Ar a x e au t ou r d ' E r i -
van, ancien lac q u i s'est asséché quand le fleuve a forcé au sud-est
le barrage naturel de la montagne. « Mais le lac disparu a laissé
sur son ancien emplacement une terre légère et fertile, formée du
l imo n qu ' a pp o r t a i t l ' Ar a x e et q u i recouvre encore au j o u r d ' hu i
les couches de lave p r i m i t i v e
1
. »
Ce f u t en effet vers le même
temps, au Quaternaire, que les formidables épanchements v o l –
caniques déjà mentionnés achevèrent de donner à la terre armé–
nienne sa physionomie, les laves c omb l an t concurremment avec
les alluvions les anciens bassins ou les sectionnant en plusieurs
tronçons. Ce f u t alors, par exemple, que le volcan du N i m r o u d
«
coupa la dépression de Mou c h du lac de V a n », tandis que les
volcans de l ' Akma n g a n — que R. Blanchard compare à nos
puys d'Auvergne — , donnaient naissance au poissonneux lac
d'eau douce qu'est le Sévan ou lac bleu (Gôk-tchaï).
Ainsi « la bonne terre arménienne » est faite d u mélange des
dépôts lacustres, — marnes, argiles et calcaires —, avec les sols
volcaniques, ces sols q u i , au pied de l ' A r a r a t comme du Vésuve,
comptent p a rm i les plus fertiles du globe. Comme l'agriculture
égyptienne est un don du N i l , comme l'agriculture chinoise est
un don du loess, l'agriculture arménienne est un présent d u
1 .
F . N A N S E N ,
L'Arménie
et le Proche Orient
(
G e u t h n e r , 1 9 2 8 ) , p. 1 3 5 . L a
t r a d i t i o n grecque v e u t que ce s o i t Jason, le chef des A r g o n a u t e s , q u i a i t
o u v e r t une issue à l ' A r a x e vers l a Caspienne ( S T K A B O N , 1. X I , ch. s i v . § 1 3 1 .
Fonds A.R.A.M