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L E P ROT E C TOR A T ROMAIN
Artaban envoya en Arménie, pour remplacer son fils assassiné
un autre de ses enfants, Orodès, mais Pharasmane, de son côté,
appela à son aide de nouveaux mercenaires albaniens et sarmates.
Tacite nous décrit avec beaucoup de couleur la bataille au cours
de laquelle le roi ibère blessa de sa main Orodès dont les troupes
furent mises en fuite. Pendant ce temps, le général romain
Vitellius prenait les Parthes à revers du côté de la Mésopotamie
1
Mithridate d'Ibérie resta donc maître du trône d'Arménie sous le
protectorat romain.
Brusquement la folie de l'empereur Caligula compromit ces
résultats heureux. Sans raison, i l manda Mithridate à Rome et l'y
déclara déchu (37). Les Parthes ne manquèrent pas de profiter
de cette faute pour réoccuper l'Arménie. L'empereur Claude
répara l'erreur commise. Aux environs, semble-t-il, de 42,
il renvoya en Arménie Mithridate qui, fort de la protection
romaine et des contingents de son frère, le roi d'Ibérie Pharas–
mane, reconquit le pays. Pour assurer le protectorat, une gar–
nison romaine s'installa à Gorneae (sans doute Garni près
d'Erivan)
2
.
Rome avait donc réussi à rétablir son protectorat sur l'Arménie
en même temps que s'annonçait une intéressante symbiose
arméno-géorgienne destinée à dominer la Transcaucasie, lors–
qu'une tragédie domestique vint tout interrompre
3
.
En l'an 51
de notre ère le roi d'Ibérie Pharasmane trahit son frère, le
nouveau roi d'Arménie Mithridate, pour lui substituer son propre
fils Rhadamiste. Mithridate vint se placer sous la protection de
la garnison romaine de Gornese, mais le commandement de cette
garnison, Caelius Pollion, se laissa acheter par Rhadamiste. A
l'instigation de Pollion, Mithridate commit l'imprudence de sortir
de la place pour une entrevue avec son neveu. Aussitôt Rhada–
miste se jeta sur lui et le fit arrêter par ses gardes. Peu après,
il le fit étouffer et monta à sa place sur le trône d'Arménie. Le
gouverneur romain de la Cappadoce, Julius Pelignus, acheté à
son tour par Rhadamiste, donna son assentiment à cette révo–
lution (52). Cependant l'horreur causée par cette tragédie encou–
ragea le roi parthe Vologèse I
e r
à envahir l'Arménie. I l s'empara
d'Artaxata comme de Tigranocerta, chassa les Ibères et mi t sur le
trône son frère Tiridate I
e r
(53).
La rigueur de l'hiver força, i l est
vrai, les Parthes à se retirer, et Rhadamiste en profita pour
réoccuper un instant le pays, mais les vengeances qu'il exerça
provoquèrent la révolte de la population arménienne. I l dut
s'enfuir de nouveau, tandis que Tiridate s'installait définitive-
1.
T A C I T E ,
Annales,
V I , 32-36.
2.
Ibid.,
X I , 8-9. Cf. BROSSET,
Histoire de la Géorgie, Annales,
p. 63, n. 5.
3.
Cf. Em . E G L I ,
Feldzûge
in Arménien
von
41
bis
63
n. Car.,
dans les
Untersuchungen zar romischer Kaisergeschichte
de Max BUDINGER, I , p. 267-
362,
Leipzig 1868.
Fonds A.R.A.M