de femmes et d'enfants ont ainsi succombé à la
faim, à la soif, à l'horreur, à la honte.
Au début de l'itinéraire, ces pitoyables cara–
vanes diminuaient jour par jour; bientôt c'était
heure par heure. La mort devenait vite le plus
ardent souhait de tous; car comment l'espoir
eût-il pu se soutenir, comment les forces n'au–
raient-elles pas défailli, même chez les plus
résistants, dans ces étapes interminables? Et qui
tentait de s'écarter à droite ou à gauche de cette
route d'enfer, était aussitôt tué à coup de fusil
ou de lance; et qui parvenait à échapper aux gen–
darmes de l'escorte, avait tout de suite à ses
trousses des bandes de Kurdes ou de paysans à
cheval.
C'est ainsi qu'on continue à « étouffer la révo–
lution arménienne », là-bas en Asie Mineure.
J'achevais d'écrire les lignes qui précèdent,
quand apparut chez moi une dame anglaise, que
je connais depuis longtemps. Elle arrivait d'A-
dana, en Cilicie, elle s'y trouvait encore i l y a
un mois. Son récit est semblable à cent autres.
Et des faits identiques me sont confirmés par
des témoins américains, anglais, suisses, alle–
mands; toutes les déclarations se corroborent.
Cette dame anglaise m'a donc d i t : « Les dépor-
«
tations suivent leur cours. De l'intérieur, le
«
long du chemin de fer de Bagdad, ces malheu-
«
reux sont dirigés par Adana vers leur voyage
«
de mort. On se sert de la voie ferrée partout
«
où elle existe, pour hâter l'œuvre d'extermina-
Fonds A.R.A.M