sentit pourtant pas sans inquiétude. Les vieil–
lards, les femmes et les enfants constituaient
encore nn danger pour l'Empire. I l fallait extir–
per de Turquie toute la malheureuse nation.
Mais comment y parvenir de manière à per–
mettre à l'Ambassadeur tare de Washington et
à la presse allemande de dire, comme ils l'ont
dit et diront encore, que « tous les Arméniens
«
mis à mort étaient des factieux surpris les
«
mains rouges de sang, on en flagrant délit de
«
trahison, et non pas des femmes et des en-
«
fants, comme voudraient le faire croire cer-
«
tains rapports « fabriqués » pour les besoins
«
de la cause? » Talaat Bey eut nn procédé gé–
nial, « la déportation ». Nécessité militaire, me-
«
sure regrettable, mais très humaine ».
Donc, de mai à octobre, le Gouvernement ot–
toman poursuivit méthodiquement un plan d'ex–
termination de beaucoup plus infernal que le
plus sauvage des massacres. Ordre fut expédié à
toutes les provinces de l'Asie Mineure de dépor–
ter en Mésopotamie toute la population armé–
nienne. Les prescriptions étaient détaillées, ex–
plicites. Aucun hameau ne parut assez insigni–
fiant pour être omis. Des crieurs proclamèrent
dans les rues que tout Arménien devait se tenir
prêt à partir, à telle heure, pour une destination
inconnue. Aucune exception n'était faite n i des
vieillards, n i des malades, n i des femmes encein–
tes. Seuls les riches négociants, les banquiers et
les jolies femmes et jeunes filles pouvaient
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Fonds A.R.A.M