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GÉNÉALOGIE DE SAINT GRÉGOIRE.
cheur que vous êtes, devenez notre pasteur. ».
Cette grande insistance de la part du peuple
fut comme un effet de la providence de Dieu. Le
roi se leva et ordonna de veiller attentivement
sur Nersès pendant la nuit jusqu'au matin, de
peur qu'il ne s'échappât. La même nuit, l'ange
du Seigneur apparut à Nersès et lui dit : « Ne re–
fuse pas d'accepter cette direction [spirituelle],
car le Seigneur le veut ainsi. » I l répondit alors :
«
Que la volonté du Seigneur soit accomplie ! »
Le lendemain, le roi Arsacefitamener en sa pré–
sence Nersès, et, en face de l'assemblée, il se leva
tout irrité, lui enleva son glaive d'acier avec le
fourreau orné de pierreries, que Nersès portait
pour le service du roi. Il ordonna de le lier et de
lui ôter le vêtement que le roi lui avait donné.
Ensuite le roi commanda d'appeler un évéque
d'un âge respectable, nommé Festus (Phesdos) (i),
d'apporter des habits sacerdotaux, d'en revêtir
Nersès, et il le fit consacrer diacre. On lui coupa
ses cheveux bouclés, qui formaient comme une
couronne autour de sa tête. En voyant cela,
beaucoup de gens se mirent à verser des larmes,
car personne ne pouvait l'égaler en beauté. Ce–
pendant, lorsqu'ils virent la grâce divine se mani–
fester en lui, ils se réjouirent, car ils compri–
rent que c'était à lui que s'appliquaient les paro–
les de l'ange à Iousig : « De votre fils naîtra un
fils qui sera un vase choisi par les nations; il mon–
tera sur le siège de Thaddée ; il occupera la place
de ses pères, les premiers patriarches, et il indi–
quera le chemin de la vie. » On savait que c'était
Dieu qui l'avait désigné, c'est pourquoi le peuple,
inspiré par Dieu, insistait
(2).
Après cela, on réunit plusieurs détachements
de troupes et des évêques, afin de conduire le
bienheureux Nersès à Césarée, où [les Arméniens]
avaient coutume de faire consacrer leurs patriar–
ches. Le roi, à ce que l'on dit, forma une escorte
qu'il chargea d'accompagner Nersès. [Elle se com–
posait du] général Schahèn de la famille des Mami–
goniens etd'autres princes de chacime des provin–
ces : David, prince des Bagratides (Pakradouni) ;
Hemaïag, prince de Khorkhorouni ; Sahag, prince
des Ardzrouni; Manèdj, prince des Kénouni;
Tigrane (Dikran), prince des Varajnouni ; Vatché,
prince des Amadouni ; des chefs des cantons du
pays, Moujegh, prince de Daron ; Vezroug, prince
des Ibères (Virk); Vrèn, prince de Koghtèn;
Varèn,prince de la maison des Makhaz; Haïr, de
la maison des Martbed (eunuques), qu'on appelle
(1)
Faustus de Byzance le nomme Faustus (Fausdos),
1.
IV, c.
3.
(2)
Faustus de Byzance. 1. IV, c. 3.
le père du roi;Makhaz, prince des Antzévatzi ;
Zarèh, prince de Mog ; Moujan,prince d'Aghdznik;
Méhentag, prince de Reschdouni ; Varazt Scha-
houni, prince de Dzop; Vagharsch, prince
d'Antzid; Varazvaghan, prince de Kapéghian;
Rnith, princedeHaschdian; Sak, prince de Parmi ;
Antoug
(1),
prince de Siounie ; Manavaz, prince
dupays de Dzor(vallée) ; Ardag, prince de Harkh ;
Arschavir, prince de la maison d'Angegh ; Kazrig,
prince de Daïk. Ceux-ci étaient accompagnés
des évêques des sièges les plus importants : Gré–
goire, évéque de Siounie; Pharèn, évéque des
Ibères; Thathoul, évéque de Daron; Joseph,
évéque des Bagradites (Pakradouni) ; Khatchatch,
évéque de la maison du Martbed; Amos, évéque
des Peznouni; Nersès, évéque de Mog; Sapor
(
Schabouh), évéque des Ardzrouni; Absalon
(
Apésoghom), évéque des Antzévatzi ; Vahan, évé–
que des Mamigoniens ; Zavèn, évéque de Tzerdav ;
Tiridate, évéque de Pasèn; Knel, évéque de Mé-
litène. D'autres évêques encore, an nombre de
quinze, se préparèrent [à partir] avec les princes,
ainsi que d'autres gouverneurs et chefs des can–
tons du pays d'Arménie, portant avec eux la
lettre du roi Arsace et ses présents.
On fit monter Nersès en grande pompe dans
le char royal attelé de mules blanches, et on loi
donna pour escorte quatre mille cavaliers (a).
Les gens des campagnes, en les voyant venir de
loin, prenaient la fuite, croyant avoir affaire à
une troupe d'ennemis. Cependant, lorsqu'ils les
eurent reconnus, les princes des cantons leur
firent un grand accueil. Mais eux ne voulurent
point faire halte en plusieurs endroits, et ils ar–
rivèrentauxfrontièresdes Cappadociens (Kamirk),
dans la métropole de Césarée. Us parurent devant
le grand évéque Eusèbe, lui remirent la lettre
du roi Arsace, et lui présentèrent Nersès. Le bien–
heureux évéque les reçut avec de grands hon–
neurs et des témoignages d'amitié;puis, selon
les préceptes des apôtres, il réunit de suite un
grand nombre d'évêques des contrées de la Grèce,
afin de consacrer avec pompe le grand Nersès
comme catholicos de la Grande-Arménie, qui
était le partage de l'apôtre Thaddée.
Lorsqu'on entra dans l'église, un grand pro–
dige se manifesta : une colombe blanche des–
cendit du ciel sous une forme matérielle, et se
posa sur le saint autel, aux yeux de tout le clergé
(1)
Faustnsle nomme Antov. —Cf. 1. IV, c. 4.
(2)
Comparez ce que dit ici notre auteur avec le récit
du cérémonial du voyage de Grégoire l'Uluminateur à
Césarée, dans Agathange, ch. 113, et p. 171 du 1
e r
vol.
de notre Collection.
Fonds A.R.A.M