lui, le nom de
daniélien
qui lui est attribué est
donc un anachronisme qu'il est bon de signaler
en passant, bien que l'usage ait consacré cette
appellation erronée. Le témoignage de Moïse de
Khorène est
formel lorsqu'il
parledel'antiquité des
caractères arméniens (i), et son opinion se trouve
corroborée par Lazare de Pharbe qui constate
également l'antiquité de cet alphabet, en citant
les paroles adressées à des Arméniens par le roi
Vram-Schapouh : « J'ai vu les lettres arméniennes
chez un évéque, dans un village (a), » et plus
loin : « Saint Machdotz (Mesrob), voyant à quelles'
difficultés était assujettie l'éducation de la jeunesse
arménienne, qui, à cette époque, était obligée
d'aller, loin de sa patrie, chercher l'instruction
dans les écoles où l'on enseignait la langue syria–
que, s'affligea grandement, surtout lorsqu'il
s'arrêtait à cette pensée qu'il existe des signes de
la langue arménienne, à l'aide desquels on peut
représenter ses pensées, sans être obligé de re–
courir à des lettres étrangères
(3).
»
Enfin, dans
un troisième passage, Lazare de Pharbe nomme
l'évêque dont il a été question quelques lignes
plus haut : « Chez un pieux personnage, l'é–
vêque Daniel, se trouvaient les signes armé–
niens
(4). »
Les renseignements que les contemporains de
Mesrob nous fournissent sur l'existence d'un
ancien alphabet arménien, ou, pourme servir de
l'expression consacrée, de l'alphabet
daniélien,
sont confirmés par les écrivains postérieurs. Ainsi
Jean Catholicos, Etienne Assoghig, Samuel
d'Ani, Guiragos de Kantzag, Vartan le Grand et
quelques autres, font mention, d'une manière plus
ou moins explicite, de cet ancien alphabet. Jean
Catholicos s'exprime ainsi : « Dans le même
temps, Mesrob nous apporta, pour écrire notre
langue, des caractères qui lui avaient été révélés
par la faveur de Dieu (5). » Assoghig raconte avec
des détails plus circonstanciés le même fait (6) :
*
Ce fut S. Mesrob qui le premier inventa et en–
seigna l'art d'éerire et de lire, avec des caractères
(1)
Moïse de Khorène,
Hist. d'Arm.,
liv. I I I , ch. 52 .
(2)
Lazare de Pharbe,
Hist. d'Arm.
(
en arm. ), p. 27.
(3)
Lazare de Pharbe,
op. cit.,
page 27.
(4)
Lazare de Pharbe, op.
cit.,
p. 27.
(5)
Jean Catholicos,
Hist. d'Arm.
(
en arm.), p. 32 de
Féd. de Moskou. —Saint-Martin,
Hist. d'Arm.
de Jean
Catholicos, p. 45 .
(6)
Assoghig,
Hist. univers,
(
en arm.), page76 et suiv.
Cf. aussi
Tchamilch,
Hist. d'Arm.,
1.1,
p.
756.
arméniens..... Sous le règne [de Théodose le
jeune], vivaitle saint patriarche d'Arménie Sahag,
du vivant de qui l'alphabet arménien de vingt-
neuf lettres fut composé par le philosophe syrien
Daniel. Quant aux sept lettres qui manquaient,
le bienheureux Mesrob de Daron les obtint de
Dieu par ses prières. » Samuel d'Ani donne
encore des informations plus précises, en disant :
«
Machdotz, le même que le bienheureux Mesrob,
et Sahag le Grand perfectionnèrent avec leurs
collègues les formes des lettres de Daniel, et, un an
après, ils enfirentautant des lettres révélées par
Dieu (i). » Guiragos de Kantzag nous fournit
également des renseignements précieux : « Ils
communiquèrent leur projet au roi Vram-Scha–
pouh qui leur dit : « Pendant que j'étais en Syrie,
un évéque syrien nommé Daniel m'apprit qu'il
possédait les lettres de la langue arménienne
En les regardant, ils virent que ces caractères ne
suffisaient pas pour rendre complètement les
syllabes, les liaisons et les mots (a). » Vartan le
Grand est, de tous les écrivains dont nous avons
cité des extraits, celui qui fournit les détails les
pins précis sur la question qui nous occupe :
«
La cinquième année du règne de Vram-
Schapouh et la première d'Ardaschir fils de
Schapouh, saint Mesrob mit en ordre l'alphabet
arménien ; vingt-deux lettres des temps reculés
furent trouvées chez l'évêque Daniel ; mais, comme
elles ne suffisaient pas pour représenter la r i –
chesse de notre langue, elles furent abandonnées-
par les anciens qui commencèrent dès lors à em–
ployer les caractères grecs, syriaques et perses.
Il n'était pas possible à Mesrob de traduire à
l'aide de ces caractères les Livres-Sainte dans la
langue arménienne; c'est pourquoi, s'étant livré à
la prière, il reçut quatorze lettres de Dieu qui les
traça de sa propre main devant lui sur le mont Pa-
lou....... L'existence de lettres arméniennes d'une
époque reculée fut confirmée au temps du roi
Léon [II]. On trouvaune monnaie avec des caractè–
res arméniens
(3)
sur laquelle était tracé le nomde
(1)
Samuel d'Ani,
Chronographie
(
éd. Mai et Zohvab),
adann. Olymp.
300,
et ad ann.
421,
p. 46.
(2)
Guiragos,
Hist. d'Armén.
(
éd. de Venise),p. 15.
(3)
Il ne peut être question ici de médailles armé–
niennes, car on sait que les monnaies des rois arsacides
d'Arménie ne portent que des légendes grecques. Il est
probable que la pièce dont il est fait mention dans Var–
tan, était une médaille frappée par l'un de ces satrapes
relevant de la puissance des monarques achœménides,.
Fonds A.R.A.M