DISCOURS PRÉLIMINAIRE.
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neur des lettres grecques et syriaques, on pourrait dire que ces deux siècles
furent comme frappés de stérilité. Ce fut à ces sources presque taries que pui–
sèrent les Arméniens ; et un fait digne de remarque, c'est que tous les auteurs
qu'ils ont traduits dans leur langue sont, à part quelques rares exceptions, des
écrivains dont le nom nous est à peine connu et dont les œuvres originales ont
presque entièrement disparu.
Quoi qu'il en soit de cette influence exercée parles hellénistes sur l'idiome
national, on doit dire toutefois que les ouvrages originaux des écrivains armé –
niens de la fin du quatrième siècle et du commencement du cinquième sont les
plus importants et les plus remarquables de toute la littérature de l'Arménie. E n
effet cette période est féconde en écrits religieux, historiques, philosophiques
et littéraires, et c'est à juste titre qu'elle a été désignée sous le nom de période
de
Yâge d'or.
En passant en revue les grandes illustrations littéraires qui bril–
lèrent à cette époque , en donnant un court aperçu des productions littéraires
qui illustrèrent les temps qui nous occupent, on découvre un vaste et admirable
ensemble d'œuvres capitales, qui suffisent à elles seules pour immortaliser la
vieille race des enfants d'Haïg. Au surplus c'est à ces hommes d'élite , à ces
intelligences remarquables, à leurs écrits et aux efforts de leur génie que
l'Arménie doit sa renaissance littéraire, et on peut dire, sans crainte d'être
démenti, que sans ces maîtres immortels les Arméniens , qui depuis une lon–
gue suite de siècles sont soumis à des dominateurs étrangers, eussent perdu de–
puis longtemps déjà leur nationalité, leur religion et leur idiome !
L'histoire de la littérature arménienne à l'époque où nous sommes arrivés
en ce moment s'ouvre avec saint Sahag. Cet illustre patriarche de l'Arménie
était le fils de saint Nersès le Grand, et descendait de saint Grégoire l'IUumi-
nateur. I l alla étudier les sciences à Constantinople, et de retour dans sa patrie,
il s'occupa de la traduction des Livres Saints, et publia une lettre canonique
en six chapitres, qui parut aussitôt après l'assemblée tenue à Yagharschabad.
On a aussi de lui quelques lettres traitant de questions religieuses, des prières et
des hymnes conservées dans le
Chàragan
(
i ) .
Saint Mesrob, collaborateur de saint Sahag, et qui contribua à doter l'Ar–
ménie de caractères alphabétiques, a laissé, outre les traductions de plusieurs
ouvrages, le rituel coordonné par lui , ce qui a fait donner à ce livre le nom de
Maschdots
,
prénom de Mesrob
(2)
.
La tradition lui attribue aussi quelques
hymnes et quelques prières (3).
Eznig de Goghp, disciple de saint Sahag et de Mesrob, fut un des lettrés
envoyés à Edesse pour transcrire les livres syriaques. D'Edesse Eznig passa à
Constantinople, où il se perfectionna dans l'étude des lettres grecques ; il revint
ensuite dans sa patrie, où peu de temps après il fut consacré évêque de Pa-
(1)
Karékin,
Hist. de lalitlér, arm.
(
Venise, 18G5, in-12), en arm., pag. 165 et suiv.
(2)
Venise, 1827'.
(3)
Karékin,
op. cit.,
pag. 172 et suiv. — Cf. aussi plus bas, pag. 1 et su i t . , la
Biographie de
Mesrob,
par Gorioun.
Fonds A.R.A.M