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MAR A P A S CAT I NA .
le Mède ( i ) , il ravit le royaume de Sardanapale.
A présent j'éprouve du bonheur et de la joie en
arrivant au véritable ancêtre de notre nation
(2),
dont les descendants furent élevés au rang de
roi ; aussi nous avons une grande tâche à accom–
plir, bien des sujets à traiter. Nous avons cru de
notre devoir de lire les preuves de ces faits dans
quatre livres composés par cet homme sage et
éloquent, le plus sage d'entre les sages
(3).
Varbace, d'un canton de la Médie, à la pointe
extrême de la province la plus fortifiée, homme
d'une grande astuce, célèbre dans les combats,
voyant la vie efféminée et l a mollesse volup–
tueuse du faible et vil Concholéros
( 4 )
,
gagne par
sa conduite, par ses largesses, beaucoup de par–
tisans, parmi les personnages braves et puissants
Les inscriptions assyriennes des Sargonides,
p.
6,
du t. VI (V
e
série) des
Annales de philosophie
chrétienne,
1862.)
(1)
Varbace ou plutôt Arbace, comme l'appelle Dio–
dore de Sicile (liv. I I , ch.
24
et suiv.). — Cf. aussi
Ch. Muller,
Fragm. hist. grxc,
t. III, p.
357
et suiv.;
210.
(2)
On peut présumer d'après ce passage, rapproché
du témoignage de Jean Catholicos (ch. vm), que Ba–
rouïr était de la race de Haïg, qu'il reprit sur les usur–
pateurs étrangers qui s'étaient emparés du gouverne–
ment de l'Arménie sous Anouschavan, le trêne de ses
ancêtres. « Après eux ( les usurpateurs ), dit Jean Ca–
tholicos, régna Barouïr qui rétablit le nom de la nation
arménienne, dont la souveraineté était détruite depuis
longtemps. Il fut le premier qui ceignit chez nous le dia–
dème des rois
Les écrivains de notre nation ont déjà
célébré les louanges de Barouïr, et je n'ai pas envie d'en
parler après eux. » (Jean Catholicos,
Hist. d'Arménie,
trad. de Saint-Martin, p.
14-15.)
(3)
Cet écrit en quatre livres a peut-être quelque
rapport avec ces panégyriques que des écrivains armé–
niens, aujourd'hui perdus, avaient composés à la louange
de Barouïr. — Cf. Jean Catholicos,
Hist. d'Arménie,
p.
15,
et la note précédente.
(4)
Le nom de KovocrxoYxôXepo; n'a jamais été, comme
les Grecs l'ont supposé, un surnom de Sardanapale;
c'est un titre royal qui se trouve dans les inscriptions de
ce prince, expliquées par les assyriologues, et qui signi–
fie mot à mot :
ego rex, vicem gerens DeiAssori (Arch.
des miss, scientif.,
t. V, p.
205).
Au surplus les in–
terprètes anciens des textes cunéiformes ont commis
une erreur bien aussi grave en donnant pour père, à
Sardanapale, un personnage imaginaire du nom d"Ava-
Çuv6apa
&
r); ou 'AvaÇuvSapaÇàpy);, nom qui n'est autre
chose que le titre royal de Sardanapale :
ego rex augvr
stus Assyrise,
que nous ont conservé les textes en lan–
gue assyrienne. Les Grecs qui ne comprenaient pas la va–
leur des mots de cette langue, ont pris ce titre tout
entier pour un nom propre et ont forgé ainsi une appel–
lation barbare qui eut une grande vogue dans toute l'an–
tiquité et qui a été souvent rappelée par les écrivains
classiques, à propos de l'inscription célèbre du tombeau
de Sardanapale. Cf. notre
Mémoire sur le tombeau de
Sardanapale à Tarsous,
dans la
Revue archéologique, |
(1853);
et notre
Voyaqe en Cilicie,
p.
265
et suiv.
!
qui alors soutenaient avec dignité et une grande
fermeté l'empire d'Assyrie. I l se concilie l'amitié,
de notre brave satrape Barouïr, lui promettant
l a couronne et tout l'éclat de l a royauté ; i l s'at–
tache aussi un grand nombre de vaillants guer–
riers habiles à manier le javelot, l'arc et le glaive.
Varbace, s'emparant de cette manière des États de
Sardanapale, commande à l'Assyrie et à Ninive;
mais i l y établit des gouverneurs et transporte
aux Mèdes l'empire des Assyriens.
Si ces faits, chez les autres historiens, sont
rapportés différemment
(1),
ne t'en étonne pas ;
car comme plus haut, dans les premiers chapi–
tres
(2),
nous avons blâmé les usages de nos p r e –
miers ancêtres qui ne prenaient aucun souci de
l a science, i l arrive encore i c i l a même chose.
Les faits et gestes du père de Nabuchodonosor ont
été consignés dans les annales et les registres
de ses inspecteurs des mémoriaux
( 3 ) ;
or nos
princes n'ayant pas songé à faire de même, i l n'y
a eu de transcrit que les
faits accomplis
dans les
derniers temps. S i on demande : « où donc avons-
nous trouvé les noms, les faits et gestes de beau–
coup de nos ancêtres? » j e répondrai : « dans les
anciennes archives des Chaldéens, des Assyriens,
des Perses
( 4 ) ,
à cause de l a mention faite dans
les écrits royaux des noms et des actes de nos
aïeux comme chefs de l'administration, chargés
par les rois du gouvernement général. »
.
X V . (CH. xxii.)
Suite de nos rois. — Leur nombre de père en fils.
Je vais compter nos grands hommes, surtout
les rois, jusqu'à l'empire des Parthes, parce qu'ils
me sont chers ces descendants de notre monarque
couronné, comme mes compatriotes, mes proches
et mes frères. Comme i l m'eût été doux, si le Sau–
veur (Perguitch) fut alors venu me racheter, d'en–
trer dans le monde sous de tels monarques, de
jouir du bonheur de les voir et d'échapper aux
dangers du temps présent (5) ! Mais ce sort heu -
(1)
Cf. notamment Diodore de Sicile, liv. II, ch.
24
et
suivants.
(2)
Cf. Moïse de Khorêne,
Histoire oVArménie,
liv. I
v
ch.
3.
(3)
M. Emin a rendu l'expression
ichogouthiantz ve-
ragatzoukh
par « préposés à la garde des archives »,
dans sa traduction russe de l'ouvrage.de Moïse de Kho–
rêne, p.
60 ;
et
ad calcem,
note
81.
(4)
Rapprochez ce passage de ce que dit Moïse de Kho–
rêne (liv.
11,
ch.
3),
au début de son Histoire, dans sa
dédicace à Isaac Bagratouni.
(5)
Moïse de Khorêne fait allusion ici à la domination
Fonds A.R.A.M