26
          
        
        
          
            MA l l A P A S (ÎATINA.
          
        
        
          
            V I I I . ( CH . xv . )
          
        
        
          
            Jra. Sa mort dans une guerre suscitée par Sémi–
          
        
        
          
            ramis. '
          
        
        
          
            Ara, peu d'années avant la mort de Ninus,
          
        
        
          
            obtint le gouvernement de sa patrie, jugé
          
        
        
          
            digne d'une telle faveur par Ninus, comme
          
        
        
          
            [
          
        
        
          
            antérieurement] son père Aram. Mais l'im–
          
        
        
          
            pudique et voluptueuse Sémiramis (Schami-
          
        
        
          
            ram) ( i ) , ayant entendu parler depuis longues
          
        
        
          
            années de la beauté d'Ara, brûlait du désir de
          
        
        
          
            satisfaire sa passion; cependant
          
        
        
          
            éllp
          
        
        
          
            ne pouvait
          
        
        
          
            agir ouvertement. Mais après la mort, ou plutôt
          
        
        
          
            après la fuite de Ninus en Crète, comme je le
          
        
        
          
            crois, Sémiramis mûrissant en sûreté sa passion,
          
        
        
          
            envoie des messagers au bel A r a , avec de riches
          
        
        
          
            cadeaux, accompagnés d'instantes prières, de
          
        
        
          
            promesses magnifiques, pour l'engager à venir la
          
        
        
          
            trouver à Ninjve, à l'épouser et à régner sur tout
          
        
        
          
            l'empire de Ni nus, ou seulement à satisfaire son
          
        
        
          
            ardente passion, et à retourner ensuite en paix
          
        
        
          
            dans ses propres états, comblé de présents.
          
        
        
          
            Déjà les ambassades
          
        
        
          s
        
        
          
            '
          
        
        
          
            étaient succédé sans i n –
          
        
        
          
            terruption , et Ar a refusait toujours. Alors Sémi–
          
        
        
          
            ramis , furieuse du mauvais résultat de ses mes–
          
        
        
          
            sages, lève toute l a multitude de ses troupes,
          
        
        
          
            se hâte d'arriver sur le territoire des Arméniens,
          
        
        
          (1)
        
        
          Le nom de Sémiramis porté parla reine d'Assyrie,
        
        
          femme de Ninus, présente au point de vue philologique
        
        
          une étude assez curieuse. Un savant linguiste, M. Ph.
        
        
          Luzzato, suppose que cette appellation est tirée du sans- ,
        
        
          erit et qu'elle se compose du radical
        
        
          
            smri
          
        
        
          ou
        
        
          
            smar,
          
        
        
          
            a
          
        
        
          aimer » et du suffixe
        
        
          
            ma
          
        
        
          avec la voyelle de liaison
        
        
          
            a,
          
        
        
          ce qui donnerait la forme
        
        
          
            Smarama
          
        
        
          ou
        
        
          
            Smirama,
          
        
        
          par
        
        
          suite de l'affaiblissement de l'a en i . D'après cette éty-
        
        
          mologie, le nom de Sémiramis acquiert le sens de
        
        
          
            c celui
          
        
        
          qui aime » (
        
        
          
            Le Sanscritisme de la langue assyrienne,
          
        
        
          p. 32.
        
        
          
            —
          
        
        
          Le
        
        
          
            même, Sur l'existence du Dieu assyrien
          
        
        
          
            Sémiramis
          
        
        
          ,
        
        
          dans
        
        
          
            \
          
        
        
          
            e Journal asiatique,
          
        
        
          1851).
        
        
          Diodore
        
        
          de Sicile ( l i v . I I , ch. 4 ) donne toutefois une autre éty-
        
        
          mologie du nom de Sémiramis qui, selon l u i , signifie
        
        
          «
        
        
          colombe » en langue syrienne. ( Cf. Creuzer,
        
        
          
            Relig.
          
        
        
          
            de l'antiquité,
          
        
        
          trad. Guigniaut, t . I I , p. I , p. 33. —
        
        
          Maury,
        
        
          
            Hist. des rel. de la Grèce antique,
          
        
        
          t . I I I , p. 211-
        
        
          212. )
        
        
          
            —
          
        
        
          On n'est pas d'accord aujourd'hui sur l'époque
        
        
          exacte où vécut Sémiramis, et les dernières découvertes,
        
        
          amenées par le déchiffrement! des textes cunéiformes,
        
        
          donnent
        
        
          à
        
        
          penser que la reine d'Assyrie ne serait pas
        
        
          l'épouse de Ninus, comme :1e disent Ctésias et Diodore
        
        
          de Sicile, mais bien la femme de Bélochus I I I , le dernier
        
        
          roi de la deuxième dynastie ninivite, qui vécut environ
        
        
          huit siècles avant notre ère. — Quoi qu'il en soit, nous
        
        
          croyons que la guerre entreprise par Sémiramis contre Ara
        
        
          roi d'Arménie n'est qu'une allégorie, et qu'il faut voir dans
        
        
          ces récits des historiens grecs et orientaux le développe–
        
        
          ment de la puissance assyrienne cherchant à étendre sa
        
        
          domination sur les empires voisins et
        
        
          à
        
        
          les réduire sous
        
        
          le joug.
        
        
          
            et de fondre sur Ar a . Mais i l était évident que ce
          
        
        
          
            n'était pas tant pour tuer Ara ou le mettre en
          
        
        
          
            déroute, qu
          
        
        
          '
        
        
          elle
        
        
          
            se hâtait ainsi, que pour le sub–
          
        
        
          
            juguer,
          
        
        
          s
        
        
          
            '
          
        
        
          
            emparer de lui pour satisfaire ses pas—
          
        
        
          
            sions; car devenue folle d'amour au seul portrait
          
        
        
          
            qu'elle avait entendu faire d ' Ar a , comme si elle
          
        
        
          
            l'eût vù, elle brûlait de feux dévorants. Elle ac–
          
        
        
          
            court en se précipitant dans la plaine d'Ara, ap–
          
        
        
          
            pelée de son nomArarat. Au moment d'engager
          
        
        
          
            le combat, elle ordonne à ses généraux de faire
          
        
        
          
            en sorte
          
        
        
          ,
        
        
          s
        
        
          
            '
          
        
        
          
            il est possible, d'épargner la vie d'Ara.
          
        
        
          
            Mais au fort de la mêlée, l'armée d'Ara est mise
          
        
        
          
            en pièces, et il meurt dans l'action, frappé par
          
        
        
          
            les soldats de Sémiramis. L a reine envoie après
          
        
        
          
            la victoire sur le lieu du combat ceux qui dé–
          
        
        
          
            pouillent les cadavres, afin de chercher parmi
          
        
        
          
            les morts l'objet de son amour. Ar a fut trouvé
          
        
        
          
            '
          
        
        
          
            sans vie au milieu de ses braves compagnons d'ar–
          
        
        
          
            mes. Sémiramis le fait placer sur la terrasse de
          
        
        
          
            son palais.
          
        
        
          
            Cependant, comme les troupes arméniennes se
          
        
        
          
            ranimaient au combat contre la reine Sémiramis,
          
        
        
          
            pour venger la mort d'Ara ; elle dit : — « J ' a i
          
        
        
          
            ordonné à mes dieux, de lécher les plaies d'A–
          
        
        
          
            ra ( i ) , et i l reviendra à la vie. » — Elle espérait
          
        
        
          
            par l a vertu de ses maléfices ressusciter A r a ,
          
        
        
          
            tant la fureur de sa passion avait égaré sa raison»
          
        
        
          (1)
        
        
          Les
        
        
          
            Recherches sur le paganisme arménien
          
        
        
          de
        
        
          -
        
        
          M. Emin contiennent, touchant ces divinités dont la
        
        
          fonction était de lécher les plaies des guerriers tombés-
        
        
          sur le champ de bataille et de les rappeler à la vie, de
        
        
          curieuses révélations. I l paraît que les dieux d'un rang i n–
        
        
          férieur qui s'appelaient
        
        
          
            Aralèz
          
        
        
          ou
        
        
          
            Arlèz
          
        
        
          (
        
        
          mot composé
        
        
          dont la signification propre, en arménien, est « léchant
        
        
          continuellement »),étaient des êtres surnaturels nés d'un
        
        
          chien,
        
        
          à
        
        
          ce que nous apprend Esnig
        
        
          
            (
          
        
        
          
            Refut. des héré–
          
        
        
          
            sies,
          
        
        
          p. 98 et 100, éd. armén. de Venise). Ces dieux se–
        
        
          condaires , qui étaient passés de l'Assyrie dans le pan–
        
        
          théon arménien, persistèrent dans les croyances du peu–
        
        
          ple d'Haïg, même après l'introduction du christianisme,
        
        
          car Faustus de Byzance, auteur du quatrième siècle, en
        
        
          .
        
        
          racontant la mort du général arménien Mouscheg, arri–
        
        
          vée sous le règne du roi Varazdat, de la dynastie arsa–
        
        
          cide (384 ans après J.-C), ajoute que sa famille espérait
        
        
          que les
        
        
          
            Arlèz
          
        
        
          descendraient des espaces de l'air pour
        
        
          lécher la blessure de Mouscheg et le ressusciter (Faustus-
        
        
          de Byzance,
        
        
          
            Hist. d'Arménie,
          
        
        
          liv. V, ch. 15.
        
        
          
            —
          
        
        
          Cf. sur
        
        
          le mythe des Arlèz la
        
        
          
            traduction russe de l'histoire de
          
        
        
          
            Moïse de Khorêne
          
        
        
          par M. Émin (Moscou, 1858), p. 251-
        
        
          258,
        
        
          note 57.
        
        
          
            —
          
        
        
          Le même,
        
        
          
            Vebk..,
          
        
        
          p. 83 et suiv. — Le
        
        
          même
        
        
          '
        
        
          ,
        
        
          
            Recherches sur le pagan. armén.,
          
        
        
          p. 36 et suiv.)
        
        
          —
        
        
          Le mythe des Aralèz paraît avoir été connu des Grecs,
        
        
          car Platon,
        
        
          à
        
        
          la fin de sa République, raconte d'Er l'ar–
        
        
          ménien qui fut tué dans une bataille, que son corps fut
        
        
          trouvé intact après le combat, et qu'ayant été ensuite
        
        
          rappelé à la vie, ce personnage donna des détails sur ce
        
        
          qu'il avait vu dans l'autre monde. (Cf.
        
        
          
            Œuvres de Pla–
          
        
        
          
            ton,
          
        
        
          (
        
        
          trad. de V. Cousin), T. X. p. 279 et suiv. — Moïse
        
        
          de Khorêne,
        
        
          
            traduction russe, ad calcem,
          
        
        
          note 57.)
        
        
          Fonds A.R.A.M