2 2
MAïl A P A S CAT1NA.
et comment i l s'y prit? nous le raconterons en
son temps ( i ) .
Kégham
retourne à la plaine au pied de la
montagne, et dans un vallon escarpé, i l bâtit
lui-même un village, qu'il appelle de son nom
Kégharoi, et q u i , dans la suite, fut nommé
K am i (a), par son petit-fils Karn i g . De sa descen–
dance était issu, à l'époque d'Ardachès petit-fils
de Vaîarsace, un jeune homme appelé Varj (3),
adroit à la chasse des cerfs, des chèvres sauvages
et des sangliers, habile à lancer le javelot; Ar da -
chès l'institue gardien des chasses royales, et l u i
donne des villages sur les bords du fleuve appelé
Hraztan (4). On dit que c'est de l u i qu'est issue la
maison des Varajnouni (5). Kégham, comme nous
l'avons rapporté, engendra Harma et d'autres
enfants; puis i l mou r u t , en enjoignant à son fils
Harma de résider à Armavir.
Tel est cet Haïg, fils de Thorgoni, fils de Th i -
ras, fils de Gomer, fils de Japhet, ancêtre des
Haïasdani (Arméniens); tels sont ses races, ses
(1)
Cf. Moïse de Khorêne,
Hist. d'Arménie,
liv. I I ,
ch. 7.
(2)
Cette ville était située dans la partie méridionale
du canton de Kégharkouni, au pied du mont Kegh, sur
les bords du torrent du même nom. Le roi Tiridate y fit
élever, dans le troisième siècle de notre ère, un palais
pour sa sœur Kliosrovitoukhd ( Moïse de Khorêne,
Hist:
d'Arménie,
liv. I I , ch. 90). Cet historien raconte qu'il
le décora de magnifiques bas-reliefs, et qu'il y fit gra–
ver une inscription en caractères grecs, en l'honneur de
la princesse sa sœur. Kami n'est plus qu'un village qui
a fait donner
à
la contrée"voisine le nom de vallée de
Karni ou Karnoudzor (Arakhel de Tauris, ch. I , p. 6;
IV, 39, 45,48 et
passim.
—
Indjidji,
Arm. anc.,
p. 265.
—
Le même,
Arm. mod.,
p. 256 ).
(3)
Varj
signifie en arménien, « adroit, habile. »
(4)
Cette rivière est un des affluents de l'Araxe ; elle
traverse Erivan, et porte aujourd'hui le nom de
Zengui-
sou
en turc, en arménien
Zangou-ked
[
rivière de Zen-
gui]. (Indjidji,
Arm. mod
.,
p. 25.
—
Le même,
Arm.
anc.,
p. 457.)
(5)
La satrapie des Varajnouni se trouvait dans la
province d'Ararat. Cependant i l parait que les membres
de cette famille possédaient encore des apanages dans le
Douroupéran et Je Vasbouragan
et
qu'ils donnèrent leurs
noms à des cantons de ces deux provinces (Cf. la
Géogr.
de Moïse de Khorêne, dans Saint-Martin,
Mémoires
sur l'Arménie,
t. I I , p. 362 et 366). Les princes appar–
tenant à la race des Varajnouni ont laissé peu de traces
dans l'histoire -, on sait toutefois qu'en 360 et quelques
années plus tard, un certain Dikran [Tigranc] et un sa–
trape du nom de Méhentag possédaient en apanage le
territoire de Varajnouni ( Mesrob,
Vie de saint Nersès,
en arménien, p. 61 et 75). Un Sahag Marzban [gardien
des frontières], de la famille des Varajnouni, vivait en
l'an 1000 de notre ère ( Mathieu d'Édesse,
Chronique,
liv. I , ch. 33). Leur principauté cessa d'exister dans le
courant du onzième siècle.
descendances, et l'endroit de son séjour. Dès
lors, d i t [Ma r Apas Catina], sa postérité com–
mença à se multiplier et à remplir le pays.
Harma engendra Ar am sur le compte duquel
on raconte une foule d'actions d'éclat, d'actes de
valeur dans les combats, et qu i étendit de tous
les côtés le territoire des Arméniens. C'est de son
nom que tous les peuples appellent notre pays :
les Grecs,
Armen
(
i ) , les Perses et les Syriens,
(1)
Le nom d'Aram, qui, selon notre historien, a été
appliqué par les Grecs aux Arméniens, se retrouve sous-
la forme "Apu-evoç dans Strabon (
Géogr.,
liv. XI , ch. 4,
p. 432 ) qui dit que le thessalien Arménos qui faisait
partie de l'expédition des Argonautes, donna son nom à
l'Arménie. Justin (XLII, 2) raconte également la même
fable. Le nom d'Arménie paraît avoir été appliqué au pays
qui porte encore aujourd'hui cette appellation, à une épo–
que fort ancienne et qui est vraisemblablement antérieure
à celle à laquelle les Arméniens lui donnèrent le nom de
pays d'Haïg ou Haïasdan. Dans les livres zends, l'Armé–
nie , selon quelques critiques, est désignée sous le nom
à'Eérieméno (Vispered,
ch. I , 2. —
lzechné,
ch. 32, 33,
45. —
Vendidad,
ch. 22.
—
Cf. Anquetil Duperron
(
Zend
Avesta,
t . I , part. 2. p. 5).
—
Toutefois cette opinion
n'a pas été admise par M. Max Millier
(
Science du lan–
gage,
p. 260 de la trad. fr. ).
E u g .
Burnouf suppose sans
trop essayer de le démontrer que le nom de l'Arménie
contient le même élément,
airya ( Commentaire sur le
Yaçna,
note 2, p. cvu ). I l parait toutefois fort difficile
de trouver une racine indo-germanique dans le nom de
l'Arménie, et nous croyons plutôt que cette appellation
doit avoir sa racine dans les langues sémitiques. On sait
que l'Arménie avant d'être occupée par la race d'Haïg
y
fut habitée par des Sémites ou Araméens. Or, le nom
d'Aram est purement biblique et indique un ethnique
comme Arphaxad et Canaan (Renan,
Long, sémit.,
liv. I ,
ch. 2, p. 28). Un des membres de la famille d'Aram;
Masch
(
Genèse,
X, 23),rappelle le mont Masius qui sé–
pare l'Arménie de la Mésopotamie ( Bochart,
Phalég.
liv. I I , ch. 11 ), et on sait que les Araméens sortaient
d u
pays de Kîr[ Gourou Cyrus]. (Cf.
Amos,
IX, 7. ) Le nom
d
'
Aram qui semble indiquer une terre primitivement
occupée par les Sémites, a persisté
à
rester l'appellation)
prédominante de l'Arménie, même après l'arrivée de la
race d'Haïg, et cette appellation qui a toujours été celle
que lui ont donnée les peuples étrangers, a été aussi ac–
ceptée par les Arméniens, bien que , dans leur langage
national, le nom
d
'
Haïasdan ait constamment prévalu.
Le rapprochement que Bochart (
Phaleg,
liv. I , chu 3 ) a
fait entre les mots
Har-mini
de la paraphrase chal-
daïque de Jérémie et le nom de l'Arménie, est, je crois,
purement accidentel. Le nom d'Aram appliqué aux Sy–
riens par Strabon, d'après Posidonius ( I , 2, 34 ; XIII,
4, 6 ;
XVI, 4, 27 ), provient,
à
n'en pas douter, de la même
source que celui qui a servi à désigner l'Arménie, et i l
est présumante qu'il a été transporté de ce dernier pays
en Syrie par les Sémites descendus de l'Arménie dans la
Mésopotamie lors de l'émigration de Tharé. Ce nom d'A–
ram Olfrs ou
d
'
Aramée qui servait à désigner les contrées-
connues sous la désignation de
ZupCa
,
forme abrégée
d
'
Ao
-
aupÊa
,
fut remplacé
à
l'époque des Séleucides par
celui de Syrie. Toutefois le nom d'Aram ne se perdit
pas entièrement, et i l continua à désigner, en Orient»,
ceux des Araméens qui n'adoptèrent pas le christia-
Fonds A.R.A.M