D I S COURS PRÉLIMINAIRE.
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Depuis rétablissement de la dynastie des Séleucides jusqu'au milieu du premier
siècle de notre ère, l a domination grecque ne cessa pas en Syr i e , et la langue
des conquérants acquit dans cette région une importance et une influence dé–
cisives. L a réduction de la Syrie en province romaine n'apporta aucune mo–
dification dans les mœurs et les institutions des habitants, et la langue grecque
ne souffrit aucunement du changement politique advenu par suite de l'arrivée
des Romains. Bien plus , lorsque la religion chrétienne s'implanta en Sy r i e , la
langue grecque finit par gagner du terrain et envahit peu à peu toutes les
populations qui habitaient au-delà de l'Euphrate.
L'introduction d'un culte nouveau en Syrie fut la cause déterminante de
l'extension que prit l'idiome grec dans la partie occidentale de la Mésopotamie ;
mais, comme le peuple n'entendait pas cette langue, le clergé se vit dans la né–
cessité de remédier à l'ignorance des classes inférieures, en entreprenant des
traductions du grec en syriaque, langue vulgaire du pays. C'est à cette circons–
tance qu'est due la version
peschito
(
simple) des Livres-Saints, au deuxième
siècle de notre ère
(
i ) .
Ce premier essai de traduction n'ayant point paru satis–
faisant , les savants syriens entreprirent, au sixième siècle, de refaire une nou–
velle version, dont la rédaction fut confiée à Philoxène, évêque d'Hiéropolis, et
à Polycarpe. Un siècle plus t ard , Thomas d'Héraclée en fit la révision sur le
texte grec. Les conciles tenus en Syrie par les Pères grecs et syriens assemblés,
et dont les actes étaient rédigés en grec, déterminèrent un nombre assez con–
sidérable "de versions de ces actes en langue syriaque. E n même temps, les
œuvres des Pères grecs, traduits dans l'idiome vulgaire de Syr i e , fournirent
une abondante moisson littéraire. Cet ensemble de compositions religieuses,
empruntées aux écrivains chrétiens de la Grèce, constitue en majeure partie
le fond de l'ancienne littérature syriaque, et c'est à elle qu'il faut demander
les traductions des écrits de plusieurs docteurs de l'Eglise grecque dont les
œuvres, originairement écrites dans l'idiome hellénique, sont aujourd'hui
perdues. C'est ainsi que nous sont parvenus quelques écrits de Théodore de
Mopsueste, de Diodore de Tar s e , de Sévère d'Alexandrie et d'Eusèbe de Cé-
sarée(2). Les livres de liturgie, les décrets des conciles furent également traduits
du grec en syriaque, par des fonctionnaires de l'Eglise affectés spécialement
à ces traductions, et qui furent désignés sous le titre d'« interprètes ou traduc–
teurs (3) ». On cite parmi eux Paul , évêque de Callinique en Osrhoène, au
sixième siècle, auteur d'une version syriaque des œuvres de Sévère; Serge
de Résaïn, traducteur de livres de médecine et de philosophie ; Jacques d'Edesse,
au septième siècle, qui , outre les ouvrages des Pères, traduisit plusieurs livres
d'Aristote, notamment les Catégories, les Interprétations, les Analytiques, et
(1)
Wichelhaus,
De Novi Testant, vers. syr. ant.
—
Wiseman,
Horx syriacx,
p. 108.
—
Perles,
Meletemata Peschittoniana.
—
Renan,
Hist. des long, sém.,
p. 263.
(2)
Assemani,
Biblioth. orient.
, 1.1,
in prologo,
p. 1.
(3)
Assemani,
Biblioth. orient,
1.1,
p. 475.
è.
Fonds A.R.A.M