D I S COURS PRÉLIMINAIRE.
xj
son fils
(
i )
et à Vartkès (2) . L e s
chants de second ordre
sont désignés plus spé–
cialement pa r Moïse de Khorène sous le n om de « chant s métriques » . Da n s
ces c han t s , l es ba rde s arméniens racontaient un e l ongue suite d'événements
accomp l i s chez les A s s y r i e n s , les Mèdes et l es P e r s e s , et qui embrassaient
l'espace de plusieurs siècles. E n f i n , les
chants de troisième ordre
sont ceux qu i
renf erment des traditions spéciales aux A s s y r i e n s , no t ammen t l a légende de
P i ou r a s b , intercalée entre l e p r emi e r et le s econd livre de l 'Hi s t o i re de Moïse
de Khorène ( 3 ) .
L e s invasions et les guerres incessantes qu i ne cessèrent de désoler les contrées
de l ' Ar a r a t et de boul everser le r o y a ume d'Arménie, pendant toute l a durée
de l a dynastie des A r s a c i d e s , contribuèrent, dans une notable p r opo r t i on , à
frapper de stérilité le génie poétique de l a race d'Haïg. Ma i s l a re l i g i on chré–
tienne , en pénétrant en Arménie, acheva de por t er le coup fatal à l ' anc i enne
littérature nationale. L'apôtre saint Grégoire l ' IUumi na t eur anéantit, à ce que
racontent ses b i ographes , jusqu'aux mo i ndr e s vestiges de cette littérature p r o –
fane et païenne, e n ordonnant de l i v r e r aux flammes tous l es l i vres qu i avaient
échappé à l a torche i ncend i a i i e des envahisseurs venus de la Pe r s e ( 4 ) . Sans
attacher trop d'importance au récit des hagiographes qu i attribuent à saint
Grégoire l a destruction des chefs-d'œuvre de l'antique littérature na t i ona l e ,
nous c r o y on s , avec Moïse de Khorène , que c'est surtout l a coupable négligence
des Arméniens qu i fut l a cause pr inc i pa l e de l'anéantissement de l eur s trésors
littéraires. E n effet, l a re l i g i on de l ' E v a n g i l e , en modifiant d'une manière très-
sensible les idées et les coutumes anc i ennes des Arméniens, et en laissant
échapper de l eur s souvenirs l es vieilles traditions na t i ona l e s , c on t r i bua , dans
une très-forte me s u r e , à l a perte des chefs-d'œuvre de l'antique littérature, qu i
fut complètement oubliée, pou r laisser l a place à des compositions presque ex–
clusivement religieuses.
O n s'aperçoit aisément de cette transformation subite opérée dans les idées
du peuple arménien, en l i san t les ouvrages que nous ont t r ansmi s l eur s p r emi e r s
écrivains chrétiens. Dès que l a foi nouvelle se fut v i c tor i eusement implantée en
Arménie, à l a suite d u ma r t y r e et de l a prédication de saint Grégoire, les lettrés
d u p a y s , qu i tous faisaient partie de l a caste sacerdo t a l e , ne songèrent qu'à
conso l i der l'édifice religieux élevé pa r l ' IUumi na t eur , en répandant, au mo y e n
d'écrits n omb r e u x , l a doctrine de l'apôtre et en r eman i an t , p a r de grossiers
procédés, l'histoire primitive du pays . L e s ouvrages historiques se ressentent
tellement de cet envahissement des idées chrétiennes dans les e spr i t s , qu ' i l s
(1)
Moïse de Khorène,
Histoire oVArménie,
liv. I I , ch. 61.
(2)
Id. ibid.,
liv. I I , ch. 65.
(3)
Émin,
Vebkh.... Chants de Vancienne Arménie
(
en arménien). Moscou, 1850. —
Histoire lit–
téraire de VArménie,
par le père Katerdji (en arm.), Vienne 1851. —
Le Pazmaveb
(
Journal arm. des
Mékhitaristes de Venise), septembre 1850 et janvier 1851. —
Étude sur les chants historiques de l'an–
cienne Arménie,
dans le
Journal asiatique,
1852.
Le P. Karékin,
Hist. de la littér. armén.
(
en
arm.); Venise, 1865, p. 45 et suiv.
(4)
Moïse de Khorène,
Jlist. d'Arm.,\iv.
I I I , ch. 36, 54.
Fonds A.R.A.M