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L E P S EUDO
ments, plus que dans toute autre chose, que
l'homme peut agir. Car ils sont faciles à accom–
plir, et rien n'est capable de les empêcher. E n
effet, on ne nous ordonne pas de porter de lour–
des charges de pierres ou de bois, ou de toute
autre chose, ce qui est réservé à ceux seulement
qui sont forts de corps ; ou de construire des for–
teresses, ou de fonder des villes, ce que les rois
seuls sont capables de faire; ou de gouverner
des vaisseaux, ce que les marins seuls peuvent
faire, puisqu'ils sont habiles dans l'art nautique;
ou de mesurer et de diviser la terre, ce que les
géomètres savent faire; ou bien de cultiver aucun
de ces arts que quelques hommes possèdent et
que les autres ignorent; mais i l nous a été donné,
selon
la bonté de Di eu , des Commandements fa–
ciles à observer, tels que chaque homme qui pos–
sède une âme en lui peut les suivre avec joie, car
i l n'y a pas d'homme qui ne se réjouisse quand i l
fait ce qui est bien ; et i l n'y en a pas non plus
qui ne soit satisfait, lorsqu'il s'abstient de choses
perverses, excepté toutefois ceux qui n'ont pas
été créés pour cette gr âce , et qui sont appelés
ivraie. E t en effet, un juge ne serait-il pas inique,
s'il blâmait un homme pour une action que lui -
même n'est pas capable d'éviter?
Avida lui dit : Pour ce qui est de ces choses,
prétends-tu, ô Bardesane ! qu'elles soient faciles
à exécuter?
Bardesane répondit : J'ai ditet je répète qu'elles i
sont faciles pour quiconque le désire ; car c'est la
bonne direction d'un esprit libre et d'une âme ;
qui ne s'est pas mise en révolte contre ceux qui
la dirigent. E n effet, i l y a beaucoup de choses qui
entravent l'action du corps, et plus spécialement la i
vieillesse, la maladie et la pauvreté.
Avida dit : Peut-être est-il possible que l'homme
soit capable de s'abstenir de choses perverses,
mais qui donc parmi les hommes est capable de
faire de bonnes choses ?
Bardesane répondit : 11 est plus facile de faire le |
bien que de s'abstenir du mal. Car le bien est I
propre à l'homme, et c'est pourquoi i l se réjouit
chaque fois qu'il fait le bien ; mais le mal est l'œu- i
vre de l'Ennemi (Satan), et c'est pourquoi, quand
un homme est troublé et détourné de son élément,
il fait des choses mauvaises. Aussi, sache, mon fils,
que c'est chose facile pour un homme de louer
et de bénir son ami; mais qu'il niest pas aisé '
-
BARDE S ANE .
qu'un homme ne blâme et ne rabaisse point celui
qu'il déteste. Néanmoins le fait est possible, et
quand un homme fait ce qui est bien , son esprit
est satisfait, sa conscience est tranquille et il aime
que chacun voie ce qu'il fait; mais quand un
homme agit mal et commet une mauvaise ac–
tion, i l est agité, troublé et dominé par la colère
et l'inquiétude, i l est tourmenté et dans son
âme et dans son corps. Quand i l persévère dans
cette idée, i l n'aime à être vu par personne ; et
ces choses dont i l se réjouit et qu'accompagnent
même la louange et la bénédiction, i l les re–
pousse ; mais les choses qui l'agitent et le trou–
blent sont suivies de malédictions et de blâme.
Cependant, me dira-t-on, les fous sont satisfaits
lorsqu'ils commettent de mauvaises actions ; mais
ce n'est ni pour être loués , ni dans l'espoir
d'une récompense qu'ils agissent ainsi ; et ce plai–
sir ne dure pas chez eux. Car le plaisir qu'on res–
sent à l'état de santé et en vue d'une récompense,
est une chose, tandis que le plaisir qu'on éprouve
dans l'état de maladie et par désespoir, est autre
chose. L a luxure est une chose, et l'amour une
autre chose ; l'amitié est une chose, et la camara-
'
derie une autre chose ; aussi nous devons nette–
ment comprendre que l'ardeur effrénée de l'amour
s'appelle luxure ; et même, bien qu'on y trouve
une jouissance momentanée, elle diffère totale–
ment du véritable amour dont la jouissance est
éternellement pure et indissoluble.
Je lui répondis : D'après cette manière Avida
que voici dit également : C'est par sa Nature que
l'homme agit mal, car s'il n'avait pas été dirigé
par sa Nature à faire le mal, i l s'en abstiendrait.
Bardesane répliqua : Si tous les hommes se
conduisaient de la même manière et agissaient
avec le même esprit, alors on aurait la certitude
que c'est leur Nature qui les gouverne, et ils
n'auraient pas en eux le Libre Arbitre dont je vous
ai parlé. Cependant, afin que vous puissiez com–
prendre ce que c'est que la Nature et ce que c'est
que le Libre Arbitre, je vais essayer de vous l'ex–
pliquer.
(*)
L a Nature de l'homme consiste dans ceci :
qu'il doitnaître, croître, grandir, procréer et vieil–
lir, au moyen du manger et du boire, du sommeil
et de l'état de veille, et enfin qu'il doit mourir.
Toutes ces choses, par le fait même qu'elles sont
de la Nature, sont communes à tous les hommes;,
[
Eusèbe,
Prxp. evangel.,
VI , 10; 1—6. ]
(*)
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