qu'ils te demandent ce qu'ils désirent. Car, d'ha–
bitude, oh interroge les maîtres, mais eux n'a–
dressent pas de questions ; et chaque fois qu'ils
posent une interrogation , cela devrait être dans
le but «de diriger l'esprit de celui qui questionne,
pour qu'il le fasse d'une manière convenable, et
afin qu'ils comprennent ce qui est son désir ; car
il est bon qu'un homme sache poser les questions.
Avida répondit : Je suis désireux d'apprendre,
mais j'ai
commencé
d'abord par questionner mes
frères que voici , parce que j'avais honte de m'a-
dresser à toi.
Bardesane dit : Tu parles avec sagesse. Sache
cependant que celui qui pose ses questions con–
venablement , et a la volonté de se laisser con–
vaincre , et qui avance dans la voie de la vérité
sans obstination, ne doit point avoir de honte,
car i l procurera certainement du plaisir à celui
auquel i l adresse sa question, d'après lés princi–
pes que j ' a i indiqués. S i tu as donc, mon fils,
quelque doute dans l'esprit, sur l'objet dont tu
t'informais, dis-le nous; et si cela nous plaît éga–
lement, nous y prendrons part ; enfin, si cela ne
nous plaît pas, la nécessité nous obligera de te
démontrer pourquoi cela ne nous convient point.
E t si tu étais seulement désireux d'éclaircir ce
doute, sans avoir quelque chose dans l'esprit à
ce sujet, comme un homme qui s'est attaché der–
nièrement aux disciples, et qui est un investiga–
teur nouveau, je te l'enseignerai, afin que tu ne
te sépares pas de nous sans profit ; et si les choses
que je te dirai te plaisent, nous avons encore à
ton service d'autres choses relatives à ce sujet;
mais si elles ne te plaisent pas, au moins, en ce qui
nous concerne, nous aurons parlé sans fiel.
Avida répondit : Je désire même instamment
écouter et être convaincu, parce que je n'ai en–
tendu exprimer ce doute par aucune autre per–
sonne, mais je l'ai exposé de mon propre mou–
vement à mes frères ici présents, et ils n'étaient
pas disposés à me convaincre ; en effet, ils me di –
saient : Crois fermement et tu seras capable de
comprendre toute chose. Mais je ne puis pas
croire à moins d'être convaincu.
Bardesane dit : Ce n'est pas Avida seulement
qui ne veut pas croire, mais encore beaucoup
d'autres, parce qu'ils n'ont pas la foi en eux, et
ne sont pas même capables d'être convaincus;
car ils ne font que détruire et reconstruire, et
se trouvent privés de toute connaissance de la
vérité. Cependant parce qu'Avida ne veut pas
croire, je vous parlerai, à vous qui croyez, sur
ce qu'il désire savoir, et i l entendra quelque
chose de plus.
Alors i l commença à nous dire : I l y en a
beaucoup qui n'ont pas la f o i , et qui n'ont pas
reçu de la sagesse la connaissance de la vérité.
E t sous ce rapport, ils ne sont pas compétents
pour parler et pour instruire ; et ils ne se décident
pas facilement à écouter, car ils n'ont pas le fon–
dement de la foi pour édifier, et ils n'ont au–
cune confiance dans laquelle ils puissent avoir
espoir. E t parce qu'ils doutent aussi de Dieu, ils
n'ont
pas aussi cette crainte de l u i , laquelle
les délivrerait de toute inquiétude ; car celui qui
ne possède pas en lui la crainte de Di eu , est sujet
à toutes sortes d'inquiétudes. E t même, quoi qu'il
en soit à ce sujet, ce qu'ils ne croient pas , ils
ne sont pas sûrs de ne pas le croire à vrai dire,
mais ils ne sont pas même convaincus dans leurs
idées, et ils ne sont pas capables d'y rester fermes;
la saveur de leurs pensées est insipide dans leur
bouche, et ils sont toujours timides et pleins de
hâte et de précipitation. Mais quant à ce que
disait Avida tout à l'heure : Pourquoi Dieu ne
nous a-t-il pas créés de telle façon, que nous ne
puissions pécher ni être coupables ? — si l'homme
avait été créé a ins i , i l ne l'aurait pas été pour
lui-même, mais i l serait devenu l'instrument de
celui qui le dirigerait; et on sait que celui qui
dirige ainsi à son gr é , dirige ou vers le bien
ou vers le mal. E t comment un homme différe–
rait-il alors d'une harpe, dont un autre homme
tire des accords, ou d'un vaisseau qu'un autre
gouverne? cependant la louange et le blâme sont
dans la main de l'artiste, car la harpe ne con–
naît pas les accords que l'on tire d'elle-même,
et le vaisseau ignore s'il est bien gouverné et di–
rigé; car ce sont des instruments faits à l'usage
de celni qui possède en lui la science. Aussi
Di eu , dans sa bonté, n'a pas voulu créer l'homme
de cette façon, mais i l l'a élevé par le Libre
Arbitre au-dessus de beaucoup de choses, et i l l'a
rendu égal aux Anges. E n effet, observez le soleil
et la lune, et le firmament et le reste de ces êtres
qui sont plus grands que nous sous certains rap–
ports ; i l ne leur a pas été donné de Libre Arbitre,
mais ils sont tous régis par une loi , de manière à
ne faire que ce qui est disposé pour eux, et rien
autre chose. En effet, le soleil ne dit jamais : Je
ne veux pas me.lever à mon heure; et la lune :
Je ne veux pas changer et ne pas croître ni dé–
croître ; et aucune des étoiles ne dit : Je ne veux
pas me lever ni me coucher ; et la mer : Je ne
veux pas porter les navires et j e ne veux pas res–
ter dans mes limites; et les collines : Nous ne
voulons plus continuer à rester là où on nous a
placées; et les vents ne disent pas : Nous ne vou-
Fonds A.R.A.M