L E PSEUDO-BARDESANE .
L E LIVRE DE LA LOI DES CONTRÉES ( I ) .
Extrait de la Préface du
Spicilegium syriacum,
par le
Rd. W. Cureton (Londres, 1855).
«
Les matériaux qui ont servi au présent ou–
vrage ont été*principalement tirés de l'un des
manuscrits que l'archidiacre Tattam a obtenus en
1 8 4 3 ,
dans le couvent syrien du désert de Nitrie.
I l porte actuellement le n° 14,658 du nouveau
fonds des manuscrits du
Britisk Muséum.
On y a
joint, en 1 8 4 7 , plusieurs feuillets provenant de
fragments acquis plus tard par M. Pacho (2);
plus quatre feuillets en i 85o , d'après d'autres
fragments que le même voyageur s'est procurés à
la même source. Tel qu'il est à présent, le vo–
lume renferme cent quatre-vingt-huit feuillets.
Dans l'origine, il devait en comprendre plus de
deux cent vingt, car la dernière feuille que nous
possédons, est cotée vingt-deux, et chaque feuille
contient dix feuillets. I l y a des lacunes au com–
mencement et à la fin du manuscrit, des muti–
lations dans plusieurs endroits et de larges taches
d'huile sur quelques feuillets. Ce manuscrit est
à deux colonnes, d'une écriture grasse et assurée ;
les rubriques des différents ouvrages et des cha–
pitres sont en lettres rouges. La transcription
paraît remonter au sixième siècle de notre ère. Le
premier opuscule imprimé d'après ce manuscrit
est le célèbre traité de Bardesane,
sur le Des–
tin
»
(1)
Le titre de ce traité n'est pas donné de la même
manière en grec, ce qui est une preuve en faveur de l'o–
pinion des critiques de l'école allemande, qui, ainsi que
nous l'avons fait remarquer dans l'Introduction, consi–
dèrent cet ouvrage comme différent du fameux « Traité
du Destin » de Bardesane, et qui aurait été composé
par un de ses disciples à une époque postérieure. Eusèbe
(
Hist. eccles.,
liv. IV, ch. 30) l'appelle ô
mç>\
el*xap*xévy]ç
ôiàXoyoç, et saint Epiphane
(
Panarium adv. hieres.,
36,
p. 477 ) xatà el[xapjxévr,<;.
(2)
Cf. le compte-rendu de l'acquisition de cette col–
lection dans la préface de l'édition des
Festal letters of
Athanasius,
de W. Cureton (Londres, 1848, in-8°), pu–
bliée par le Comité des traductions orientales de Londres.
[
Manuscrits syriaques du/?
ritish Muséum,
nouv. fonds,
n° 14,658. —- W. Cureton,
Spicilegium syriacum,
p. 1
et suiv. du texte. ]
. (
Traduction faite sur le texte syriaque.)
I l y a quelques jours, nous montâmes rendre
visite à Schemschgram (1) notre frère, et Bar–
desane vint nous y rejoindre. Après qu'il l'eut
touché, et vu qu'il se trouvait bien, il nous de–
manda : De quoi parliez-vous, car j'ai entendu
votre voix du dehors, avant d'entrer? I l avait
en effet l'habitude, chaque fois qu'il nous trou–
vait en conversation sur n'importe quel sujet, de
nous demander : Que disiez-vous ? afin qu'il pût
prendre part à la discussion. Alors nous lui ré–
pondîmes : Voici Avida (2) qui nous disait que
si Dieu est un, comme vous le dites, s'il a créé
l'homme et s'il veut que vous exécutiez ce qu'il
ordonne, pourquoi n'a-t-il pas créé les hommes
de telle manière qu'ils fussent incapables de
mal faire, et qu'ils ne fassent que ce qui est bien ;
sa volonté serait ainsi accomplie.
Bardesane lui dit : Dis-moi, mon fils Avida,
pourquoi penses-tu que le Dieu de tous n'est pas
un , ou qu'il est un , et qu'il ne veuille pas que
les hommes se conduisent saintement et avec
droiture ?
Avida répondit : Moi, mon seigneur, j'ai ques–
tionné ceux de mon âge, pour qu'ils me fissent
une réponse.
Bardesane lui dit : Si tu désires t'instruire, i l
serait profitable pour toi que tu apprisses d'un
homme plus âgé qu'eux ; mais s'il s'agit d'ensei–
gner, il n'est pas nécessaire que tu les question–
nes ; au contraire, tu devrais les exhorter à ce
(1)
Ce nom, qui est écrit en grec sous la forme Sa^tYÉpa-
u.o;, fut porté également par un roi d'Émèse, dont la fille
épousa Aristobule ( Josèphe,
Antiq. judaïq.,
liv. XVIII,
ch. 6 ; et liv. XIX, ch. 8) ; par un prêtre de Vénus à Émèse
qui alla à la rencontre de Sapor quand il s'avançait contre
l'empereur Valérien (J. Malala,
Chronogr.,
t. I ,
p. 391 ). Strabon orthographie le même nom
Saptywé-
pajxoç
(
Géograph.,
lib. XVI, ch. 2, § 10).
(2)
Le nom d'Avida est écrit 'Aoeiôà en grec; la forme
latine
Avitus
en est la transcription. Nous avons fait re–
marquer dans l'Introduction que le nom d'Avitus fut
porté par Élagabal, et que les érudits allemands suppo–
sent qu'il est question ici de cet empereur syrien.
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Fonds A.R.A.M