Est-ce que déjà ces rayas ne levaient pas auda-
cieusement la tête ? Certains d'entre eux ne s'é–
taient-ils pas avisés de réclamer par devant les
t r i bunaux le recouvrement de vieilles créances,
la restitution de terres usurpées ?
Ces circonstances n'eussent peut-être pas suffi
à amener une explosion s i , du côté arménien, des
imprudences n'avaient été commises. Grisés
par la liberté, les Arméniens de Cilicie se hâtè–
rent de j o u i r des droits que le nouveau régime
leur conférait — en théorie; i l s s'oublièrent, et per–
dirent la notion du milieu où ils vivaient. Ils se
mirent à organiser leur communauté, fondèrent
des cercles où ils se réunissaient librement, entre–
pr i rent des conférences. I l n'y avait là rien que
de très légitime. Mais dans un mi l i eu où régnait
une grande tension d'esprits, ces choses très sim–
ples prenaient une importance particulière aux
yeux des Tur cs . I l a été aussi question d'emblè–
mes séditieux, de représentations théâtrales révo–
lutionnaires. I l n'y a dans ces accusations rien de sé–
rieux ni même de très exact. On a bien donné à Adana
et à Mersine des pièces historiques arméniennes,
mais presque toutes ces ^pièces avaient été déjà
jouées et publiées un demi-siècle auparavant sans
que la censure ottomane s'en fût émue. La pièce
la plus subversive
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était un drame portant ce titre
bizarre :
la Destruction de Sivas par Tamerlan,
l'on voit t our à tour sur la scène le conquérant
1
Enquête turque.
Fonds A.R.A.M