— 17 —
rêter par une violente persécution qui du coup
permît aux musulmans de s'enrichir eux-mêmes
des dépouilles de leurs victimes. C'est possible;
c'est même vraisemblable. On sait que c'est en
quelque sorte la règle dans l'histoire ottomane
que le musulman vive sur le raya. De tout temps,
principalement dans les provinces, les grandes
fortunes turques ont été édifiées sur la spoliation
brutale ou déguisée du chrétien. Au fond de tout
massacre arménien, i l y a un motif de ce genre.
Le plus souvent même, le vol en a été l'unique
mobile. A propos de l'affaire d'Adana, je lis dans
un rapport, signé du D
r
Christie, directeur du
«
Saint Paul's Institute » de Tarse :
Un fonctionnaire du gouvernement, parlant de la
situation en C i l i c i e , disait : « Nous attendons que la
ruche s'emplisse de miel, et alors l'occasion se pré–
sentera de le récolter... »
Un peu partout dans le pays les biens des A r –
méniens étaient convoités. L'an dernier, des gens
de la t r i bu Ke r im agha, passant au village de
Nadjarli, déclaraient aux paysans : « O giaours,
vous semez maintenant, mais sachez qu'avec l'aide
d'Allah, c'est nous qui recueillerons le fruit de
vos travaux. »
La Constitution n'améliora point la condition
des Arméniens. A certains égards, elle l'aggrava
même. A Adana, comme en d'autres provinces,
l'idée s'était accréditée parmi les musulmans, chez
qui l'ignorance égale la crédulité, que la Consti-
Fonds A.R.A.M