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même parole que, entre deux batailles, dans le
silence de la nuit, murmurent les vents venus
de la-plaine et des fleuves, la parole à Caïn :
«
La voix du sang de ton frère crie jusqu'à moi.
Et maintenant t u seras maudit de la terre qui
a ouvert la bouche pour recevoir de ta main le
sang de ton frère ». — Et ce n'est pas un rêve,
e'est la réalité : les nouveaux massacres d ' Ar –
ménie.
IV
Une révolution s'était opérée en Turquie
(24
j u i l l e t 1908). Abdul-Hamid avait été détrôné
(25
avril 1909), en attendant qu'un coup de
revolver rendit Enver-Pacha maître du pouvoir
(1913) :
les Jeunes Turcs! ( V I , 1-7). Dix ans
avant, à Paris, leur premier dîner révolution–
naire avait été présidé par le vénérable chef du
positivisme français, Pierre Lafflte. Dis répé–
taient : « la Turquie sera sauvée par le positi–
visme, ou elle périra » . Et c'est la parole paci–
fiste d'Aug. Comte mourant à Pierre Laffite,
qu'ils avaient prise pour devise : «
Union et
Progrès ».
Quand ils rentrèrent à Constantinople, les
Comités révolutionnaires rapportaient des doc–
trines socialistes, de l a libre-pensée, et même,
a-tr-on dit, la Marseillaise. Mais la comédie dura
juste ce qu'il fallait pour ravir d'une admira–
tion suffisamment attendrie... quelques diplo–
mates. Peu de temps. Le pan-islamisme, indif–
férent à des politiciens se piquant d'irréligion,
fut remplacé par le pan-turquisme ( V I , 3),
Fonds A.R.A.M